Samedi 12 janvier, Gilets jaunes, acte IX. Le mouvement ne s’essouffle pas : nombre de manifestants en forte hausse ; motivation intacte ! La réponse du gouvernement et du président ne semble toujours pas à la hauteur de la grave crise que traverse notre pays.
Un mouvement qui s’enracine
Chaque samedi depuis mi-novembre, la France connaît une nouvelle journée de mobilisation des Gilets jaunes. La plupart des grandes villes voient se dérouler une manifestation qui réunit plusieurs milliers de personnes. Les villes les plus mobilisées sont Rouen, Bordeaux, Nantes, Toulon, Marseille, Lille, Dijon, Toulouse ou encore Lyon.
En province comme à Paris, la fin des manifestations est souvent émaillée d’incidents entre policiers et casseurs. Les slogans varient peu et demandent la démission du président Macron et la mise en place du RIC (voir encadré p. 3). Durant la semaine, des Gilets jaunes, souvent plus âgés et retraités, occupent les abords de plusieurs centaines de ronds-points à travers la France. Ils y ont aménagé des cabanes en bois pour s’abriter. L’ambiance y est bon enfant et de nombreux automobilistes les klaxonnent afin de montrer leur soutien, certains leur apportant de la nourriture. En légère baisse, le soutien des Français reste fort, surtout dans les milieux populaires.
La réponse du gouvernement
Donnant l’impression de ne pas saisir l’ampleur du malaise de beaucoup de Français, le gouvernement peine à résoudre la crise. Il affirme comprendre le besoin de mieux vivre de son travail exprimé par les protestataires. En même temps, il semble souffler sur les braises quand certains ministres, dont celui de l’Intérieur, accusent les Gilets jaunes d’être complices des violences des casseurs.
De plus, en sous-estimant les chiffres de manifestants, il donne l’impression de tricher et de vouloir casser le thermomètre pour soigner la maladie. Mais c’est surtout le président qui attise leur colère par des formules maladroites ou en sous-entendant que beaucoup de Français sont fainéants. Il apparaît plus que jamais comme le « président des riches », ne disposant que de la confiance de 20 % des Français. Enfin, la réponse policière apparaît souvent disproportionnée, avec à ce jour quatre-vingt-deux blessés graves parmi les manifestants. En résumé, dans un pays qui a besoin de retrouver de la sérénité, la réponse générale est inadaptée.
Un grand débat pour rien ?
La principale réponse du gouvernement est l’organisation d’un grand débat national afin d’échanger avec la population sur ses attentes. Débutant le 15 janvier, il se terminera mi-mars et se déroulera sous forme de réunions dans les villes et les villages. Les maires devraient les organiser. Le gouvernement a fixé les thèmes : fiscalité et dépenses publiques, organisation de l’État et des services publics, transition écologique, démocratie et citoyenneté. Et il a fait comprendre qu’il ne remettrait pas en cause sa politique. Ce débat apaisera-t-il notre pays ? Aujourd’hui les sondages disent que 70 % des Français ne croient pas en sa capacité à apporter des réponses concrètes à leurs problèmes.
Alors que le mouvement des Gilets jaunes semble être amené à durer, il devient urgent que le gouvernement et le président de la République y apportent une réponse politique, dans un climat plus serein, au risque sinon d’affaiblir durablement notre pays.
Qu’est-ce que le RIC ?
Le RIC ou « référendum d’initiative citoyenne », c’est la possibilité pour les citoyens de réclamer un vote sur un sujet qui leur tient à cœur. Pour cela, il leur faudrait recueillir un certain nombre de signatures.
Cela concernerait des lois ou la révocation d’un élu. Par exemple, un ministre, qui serait convaincu de vol mais qui ne démissionnerait pas, pourrait être renvoyé, comme des hommes politiques qui ne tiennent pas leurs engagements de campagne.
En ce qui concerne les lois, pourrait être abordée la question des impôts, de la peine de mort, de la limitation de vitesse, du mariage pour tous ou de l’immigration. En effet, ce sont des sujets qui sont souvent au centre des préoccupations des Français. Enfin, le RIC pourrait concerner notre relation avec l’Europe.
En France, nous avons une démocratie représentative. Cela signifie que les citoyens confient leur pouvoir à ceux qu’ils élisent, c’est-à-dire le président et les députés, mais plus généralement à l’ensemble des élus.
Le RIC existe dans de nombreux pays. On appelle cela la démocratie directe. La Suisse est le pays le plus connu pour ce système de votation.
Les Gilets jaunes s’exportent
Le mouvement des Gilets jaunes fait des émules à l’étranger. De la Belgique à Israël, en passant par les Yellow Vests anglais, le fameux gilet est devenu le signe de ralliement de nombreux mécontents à travers le monde. Mais attention, tous n’ont pas les mêmes revendications. S’il existe des similitudes entre Gilets jaunes français et leurs confrères belges ou britanniques, en Irak, par exemple, il s’agit de protester pour un meilleur accès à l’eau potable. D’ailleurs, les Irakiens revendiquent la paternité du mouvement, car ils avaient déjà mis un gilet jaune en 2015 pour protester contre leur gouvernement. En revanche, peu de chance de voir des Gilets jaunes en Égypte, où la police contrôle désormais la vente de la célèbre chasuble.
Julien Magne
Actuailes n° 94 – 16 janvier 2019
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