Dans le dernier Actuailes, n° 97, tu as vu que Boeing faisait face à un accident très médiatisé. En l’espace de deux semaines, tous les pays ont interdit au 737 Max de voler au-dessus de leur territoire. Pourquoi une réaction aussi brutale ?
Les accidents d’avion sont rares : sur plus de 37 millions de vols en 2018, il y a eu une quinzaine d’accidents, faisant cinq cent cinquante-six morts dans le monde. À titre de comparaison, il y a eu environ trois mille cinq cents personnes tuées sur la route rien qu’en France. Surtout, il est devenu exceptionnel que tous les passagers d’un avion meurent. Or, en l’espace de quatre mois, ce sont deux avions identiques – et tous deux presque neufs ! – qui se sont écrasés.
Que s’est-il passé ?
Tous les soupçons se portent sur un nouveau système de sécurité qui serait défaillant. Le 737 Max n’est pas un nouvel avion : c’est une évolution d’un modèle à grand succès. S’il perd d’un seul coup sa fiabilité, il faut donc chercher en premier ce qui a changé récemment : c’est le cas des moteurs qui ont été remplacés par une version plus économe en carburant, mais aussi plus lourde et plus encombrante.
L’inconvénient, c’est qu’un avion doit rester en équilibre très contrôlé pour voler. L’air doit s’écouler au-dessus et en dessous des ailes d’une certaine façon. Avec les nouveaux moteurs, l’appareil avait tendance lors des essais à « lever le nez ». Si l’avion se cabre trop par rapport au sens dans lequel l’air s’écoule, l’air va tourbillonner au-dessus de l’aile (créant une turbulence) et s’échapper en dessous : l’aéronef n’est plus maintenu par le flux d’air et « décroche », donc tombe.
Pour corriger le problème, les ingénieurs de Boeing ont mis en place un système qui force l’avion à se pencher vers l’avant. Pour calculer dans quelle proportion il faut faire pivoter l’avion, on utilise un capteur qui détermine la position du nez – trop levé ou trop baissé – et l’angle formé par rapport au déplacement (appelé angle d’attaque). Si la mesure de cet angle est incorrecte, l’avion va pivoter, alors que ce n’est pas nécessaire, et piquer sans raison.
Boeing n’a utilisé qu’un seul capteur pour cette mesure, ce qui complique la détection d’une éventuelle anomalie. Par ailleurs, ce nouveau système n’est pas facile à désactiver : en cas d’erreur, chaque tentative des pilotes de remettre l’avion d’aplomb est aussitôt annulée par le système qui fait confiance au capteur défaillant, jusqu’à ce que l’équipage ne puisse plus maîtriser l’appareil, provoquant les drames que l’on sait.
R.-J. Quatrejas
Actuailes n° 98 – 3 avril 2019
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