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La parenté à plaisanterie

La parenté à plaisanterie

11-03-2020 à 06:43:00

L’Afrique est un continent empreint de traditions. L’Arbre à palabres vous propose de rentrer dans le cœur des plus originales de celles-ci. Le premier volet sera dédié à une pratique
qui interpelle au premier abord : la « parenté à plaisanterie », vieille tradition ouest africaine consistant à s’insulter entre membres de certaines ethnies ou familles.
Ou comment s’invectiver, au travers de joutes verbales déconcertantes, juste pour rire !

Nous sommes un vendredi comme un autre à Niamey au Niger. Dans une file d’attente, alors qu’un homme Bagobiri vient de griller la politesse, ce dernier est interpellé vivement par une femme Songhaï. Les deux protagonistes semblent prêts à en découdre, proférant des grossièretés, avant que, soudainement, les rires ne fusent. L’homme et la femme se sont en fait reconnus à leurs scarifications et n’ont pu résister à la tentation de cette joute. 

Ainsi est résumé la « cousinade à plaisanterie » : un affrontement verbal durant lequel on peut et on doit s’insulter entre membres de certaines ethnies-familles, mais qui constitue un moyen de décrispation sociale répondant à des codes très précis. Seules certaines ethnies ou familles sont autorisées à pratiquer ces joutes qui atteignent leur paroxysme lors des grandes fêtes (mariages, baptêmes et même obsèques) et peuvent choquer un public non averti tant les piques sont acérées.

Lors de l’enterrement du général Lamizana au Burkina Faso, certains n’avaient ainsi pas hésité à moquer le défunt en l’imitant et à faisant semblant de pleurer. Chose impensable en Occident mais dont l’unique objet était de banaliser l’idée de la mort. Et personne n’y perd jamais son sang froid. 

Mais si la tradition persiste, la parenté à plaisanterie est souvent dévoyée de nos jours : la jeunesse d’aujourd’hui l’utiliserait avec mauvais goût, en particulier à cause du fait que la langue française ne permet pas de retranscrire toutes les subtilités des dialectes locaux. 

Plus encore, certains y voient une certaine xénophobie qui amènerait à privilégier les siens (ainsi dans l’attribution d’emplois ou d’aides financières). Ainsi, des émissions de radio y sont dédiées et des festivals organisés partout au Sahel pour revenir aux valeurs originelles de cette pratique ancestrale et bien atypique !

 

Le savais-tu ?

Au Sahel, chaque ethnie est reliée à une autre (au moins) par ce lien de parenté à plaisanterie qui favorise la persistance de traditions séculaires, de confiance et d’entraide.

    Actuailes n° 112 – 11 mars 2020


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