Si je vous dis « film muet et en noir et blanc », vous me répondrez : « Charlot ! ». Mais au-delà de ses pitreries, Charlie Chaplin est un grand cinéaste qui nous a laissé
des œuvres majeures dont Les Temps modernes.
Alors que le cinéma parlant était déjà né (Le Chanteur de Jazz, 1927) et que la couleur faisait son apparition (timide) sur les écrans (Des Arbres et des Fleurs, 1932), le Britannique Charlie Chaplin ne change pas de formule pour mettre en scène une dernière fois son mythique personnage. En effet, le cinéma muet a ses propres codes qui n’ont rien à envier à la 3D et au numérique. En premier lieu : le noir et blanc, qui accentue la pauvreté des personnages, leur misère, tout en les poétisant. Si les caméras de l’époque ne permettaient pas une captation très fluide, les images saccadées ajoutent à la fragilité de ce vagabond foncièrement gentil et malchanceux qui n’a pas les moyens de se défendre ; d’où un personnage muet mais au jeu extravagant qui donne au récit une vraie poésie. L’accompagnement musical très étudié souligne tous les plans avec notamment une scène hilarante où Charlot adapte et chante lui-même un succès français de 1917 !
Alors qu’il est soumis à des cadences infernales à l’usine, Charlot perd son travail et va s’essayer sans succès à de multiples petits boulots. Le film est construit en chapitres, séparés par des intertitres – ou cartons – qui sont principalement des repères spatio-temporels. Ainsi se succèdent Charlot à l’usine, Charlot en prison, Charlot amoureux… comme de petits courts-métrages, mais le fil conducteur est bien visible : sur fond de crise économique et sociale, le crash boursier de 1929 n’est pas loin, la critique du fordisme et de l’american way of life est vive ! Et qui donc mieux que ce Charlot dégingandé et une orpheline aux pieds nus (Paulette Goddard) pour dénoncer cette société où sont tenus à l’écart tous ceux qui ne « produisent » pas !
Sorti en 1936, le film fit grincer des dents certains producteurs hollywoodiens et Chaplin fut accusé de sympathies communistes : aujourd’hui, il peut être considéré comme l’inventeur d’un cinéma engagé qui, tout en gags et en danses, jette un regard acéré mais dénué de cynisme sur nos sociétés.
Le savais-tu ? En septembre 1895, les frères Lumière, qui ont amélioré C’est la naissance du 7e art dont nous fêtons les cent vingt ans ! |
Catherine Bertrand
Actuailes n°121 - 14 octobre 2020
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