La loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État, qui pose les principes de la laïcité en France, est l’un des principes fondateurs de la République. C’est aussi l’un des textes les plus sensibles de notre droit, au coeur des débats actuels sur la laïcité et l’islamisme.
La loi de 1905 proclame, en premier lieu, la liberté de conscience : « La République assure la liberté de conscience. » Elle a pour corollaire la liberté religieuse, la liberté d’exercice du culte et la non-discrimination entre les religions.
Elle pose, en second lieu, le principe de la séparation des Églises et de l’État : « La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte. » Jusqu’alors, l’État reconnaissait quatre cultes (catholique, réformé, luthérien, israélite) qui étaient organisés en service public du culte. L’État payait les ministres du culte (prêtres, rabbins, pasteurs) et participait à leur désignation ainsi qu’à la détermination des circonscriptions religieuses. Les autres cultes n’étaient pas reconnus.
La loi de 1905 met fin au régime des cultes reconnus : tous les cultes sont sur un pied d’égalité. En posant le principe de la non-reconnaissance, la loi n’institue pas une ignorance légale du fait religieux : elle met fin à l’opposition entre cultes reconnus et cultes non reconnus. Dit autrement, l’État n’ignore plus aucun culte.
La loi de 1905 organise l’exercice du culte dans un cadre associatif : elle crée le statut d’associations cultuelles. Ces dernières doivent avoir « exclusivement pour objet l’exercice d’un culte » et ne peuvent recevoir de subventions publiques. En revanche, elles peuvent disposer de financements privés : c’est dans ce contexte et afin d’assurer une meilleure transparence quant à l’origine des fonds que la future loi prévoit de renforcer les contrôles sur les dons étrangers de plus de 10 000 €.
Les règles concernant le régime de propriété des édifices cultuels sont également redéfinies : tous les édifices catholiques existant en 1905 sont devenus propriété publique et mis à la disposition des fidèles et des ministres du culte. Quant aux édifices postérieurs à la loi de 1905, ils sont la propriété des associations cultuelles ou diocésaines qui les ont construits.
La loi de 1905 traite également de la police des cultes. Elle proscrit notamment la tenue de réunions politiques dans les locaux cultuels. Elle interdit, par ailleurs, « d’élever ou d’apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit », sauf dans les cimetières et les musées. Il s’agit d’affirmer la neutralité idéologique de l’État.
Avec la loi de 1905, un nouvel équilibre a ainsi été institué entre l’État, la société et les religions. Mais cet équilibre reste fragile et ne cesse d’être remis en question, notamment du fait de l’émergence de la religion musulmane, religion qui n’existait pas ou très peu sur le sol français en 1905. Les gouvernements successifs ont toujours renoncé à bouleverser son équilibre. Ainsi en est-il de la future loi confortant les principes républicains, dont l’objectif affiché est de renforcer la laïcité face aux tensions liées à l’islamisme et qui ne touchera qu’à la marge la fameuse loi portée par Aristide Briand.
Me Émilie de Boussiers
Actuailes n° 123 – 25 novembre 2020
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