Voilà quelques jours que l’Éthiopie a décidé de reprendre le remplissage de son barrage sur le Nil. Cette opération devrait s’accélérer cet été, au grand dam du Soudan et de l’Égypte, en aval sur ce fleuve. Les négociations entre ces trois pays qui dépendent des eaux du Nil sont au point mort, malgré les interventions de la communauté internationale.
Le Nil comme fleuve et source
Symbole de fertilité dans l’Égypte antique, le Nil est aujourd’hui une formidable source de vie économique. En Égypte, 95 % de la population du pays vit le long du Nil et dans son delta. Il permet l’agriculture, l’accès à l’eau douce, favorise le tourisme et tempère un climat désertique dans le reste du pays. Le haut barrage d’Assouan, construit il y a un demi-siècle, a permis de réguler son débit et d’atténuer les effets des crues.
Le Nil traverse ou longe douze pays. Mais c’est en Égypte, au Soudan (où ses branches se réunissent) et en Éthiopie qu’il se déploie le plus et rend ces pays très dépendants du plus long fleuve du monde.
Le projet éthiopien, à la croisée des bras du Nil
Imaginée dès le milieu du XXe siècle, la construction du barrage hydroélectrique « de la renaissance », en Éthiopie, est lancée en 2011. Avec ses 175 mètres de haut, ses 1 800 mètres de long et son réservoir d’eau qui sera de 80 km3, il est le plus grand d’Afrique et trois fois plus gros que son voisin du nord à Assouan. Addis-Abeba (capitale de l’Éthiopie) y voit un moyen décisif de développer son agriculture irriguée et de fournir de l’énergie.
Cependant, ce projet déjà bien avancé crée des tensions avec le Soudan et l’Égypte, qui craignent une diminution des débits d’eau et de limon1 apporté par le fleuve.
Peut-on partager l’eau qui s’écoule ?
Les accords passés au XXe siècle entre les pays du Nil prévoyaient qu’ils ne s’accapareraient pas le monopole du fleuve. Mais depuis la construction du barrage éthiopien, Le Caire, Khartoum et Addis-Abeba ne s’entendent pas sur le calendrier de remplissage du barrage. En effet, l’Éthiopie veut accélérer son accès à un barrage pleinement fonctionnel, ce qui reviendrait à limiter le débit d’eau et donc la puissance disponible pour le Soudan et l’Égypte. Même la communauté internationale se mêle de cette affaire, qui risque de déstabiliser une région à l’équilibre fragile.
Finalement, entre contraintes physiques et tourments géopolitiques, le Nil est un très long fleuve, mais pas si tranquille…
Le savais-tu ?
Le Nil, long de 6 700 km, est en fait la rencontre entre le Nil blanc, qui prend sa source au lac Victoria (Kenya, Tanzanie, Ouganda), et le Nil bleu, qui prend la sienne au lac Tana en Éthiopie. Les deux branches se rejoignent dans la capitale du Soudan, Khartoum.
1. Limon : c’est un ensemble de particules, à peine moins grosses que des grains de sable et qui viennent de l’érosion due au fleuve.
Il se dépose le long du Nil et, grâce à ses éléments nutritifs, renouvelle les sols et fertilise la terre. L’agriculture est ainsi facilitée.
Abu Jibril
Actuailes n°133 - 9 juin 2021
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