En proie à des pénuries chroniques d’électricité et d’essence qui font du quotidien un enfer, le pays du Cèdre s’enfonce chaque jour davantage dans la misère.
Est-ce comme cela que s’effondre un pays ? Le Liban, englué dans une crise bancaire, économique et sociale depuis octobre 2019, a franchi une nouvelle étape dans l’horreur cet été avec des pénuries massives de carburant qui impactent tous les secteurs du pays, déjà affaibli.
La Banque centrale subventionne depuis deux ans les hydrocarbures avec ses réserves en dollars. Or, celles-ci s’épuisent vite, faisant craindre une multiplication des prix par cinq dans les semaines à venir. Aussi, certains profitent de cette politique de subventions pour faire du profit, soit en stockant illégalement les carburants pour les revendre plus cher, soit en les faisant passer en contrebande en Syrie. Deux tiers des importations d’essence disparaissent, provoquant ces pénuries et des réactions en domino sur tous les secteurs vitaux du pays.
Depuis mi-juin, des files d’attente de véhicules se forment sur plusieurs kilomètres en amont des stations-services. Dans un pays au réseau de transport public vétuste, la pénurie d’essence entrave les déplacements et les chaînes d’approvisionnement. Les bidons d’eau potable et les sacs de pain se font plus rares ; des supermarchés et des restaurants ferment leurs portes, faute de produits disponibles. La rentrée scolaire est un défi : sans essence, les enfants et les enseignants ne peuvent se rendre en cours. Les pénuries de mazout, dont dépendent les groupes électrogènes privés, engendrent de longues coupures de courant. Les réfrigérateurs jouissent de dix heures d’électricité dans les jours fastes, les chaînes du froid sont rompues et les aliments pourrissent rapidement. Les intoxications alimentaires deviennent monnaie courante. Le système sanitaire est menacé : en cas de coupure, les machines à oxygène s’éteignent immédiatement. À Beyrouth, l’éclairage public n’est plus qu’un vague souvenir : dès la tombée de la nuit, la capitale est plongée dans les ténèbres.
Dans ce marasme anxiogène, de nombreux Libanais excédés choisissent, le cœur lourd, l’exil, pour offrir un avenir meilleur aux leurs. Une option pour les mieux lotis. La crise économique et la dépréciation de la livre libanaise ont plongé la plupart des habitants dans la misère. 78 % des Libanais vivent sous le seuil de pauvreté, selon l’ONU. Ceux-là n’ont pas les moyens de rêver d’un nouveau départ. Après plus d’un an d’attente, un nouveau gouvernement vient d’être formé, il ne reste plus qu’à espérer des réformes.
Nour
Actuailes n° 134 - 15 septembre 2021
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