Alors que l’épidémie de covid et les différentes contraintes sociales qu’elle a entraînées ont provoqué une augmentation importante de problèmes psychiatriques, intéressons-nous au trouble le plus courant, la dépression.
Il faut distinguer ce que, dans le langage courant, on appelle « une déprime » de la vraie dépression. Dans le premier cas, il s’agit d’une sensation de tristesse ou de découragement passagère et qui n’affecte pas les relations avec les autres ; dans le second, le trouble est plus profond et entraîne des conséquences importantes pour l’estime de soi, les relations aux autres, les capacités ; cela peut avoir des conséquences graves.
La dépression touche près d’une personne sur cinq sur l’ensemble de la vie ; il existe des dépressions de l’enfance, de l’adolescence et de l’âge adulte.
Les symptômes qui doivent alerter sont la tristesse, un pessimisme important, des troubles alimentaires avec perte d’appétit, des réveils nocturnes tôt le matin, des difficultés d’endormissement, un ralentissement de la pensée et de la motricité, des pleurs fréquents, une fatigue et une angoisse envahissantes et, parfois, jusqu’à l’envie de mourir. Le malade est souvent incapable de prendre une décision, même très simple, comme de choisir un repas ou de savoir où aller.
Ces symptômes sont liés à un problème de fonctionnement des hormones qui transmettent l’information entre les cellules du cerveau, les neurones. En particulier, la sérotonine, la dopamine et la noradrénaline. Mais aussi à un dysfonctionnement d’autres molécules qui permettent la plasticité du cerveau, son adaptation.
Comment cela survient-il ?
Il nous reste encore beaucoup à découvrir ! La plupart du temps, il y a un événement déclencheur : stress important, traumatisme physique ou psychique, parfois une naissance, certaines maladies associées, comme le cancer, par exemple. Mais, parfois, aucun événement ne semble relié à la dépression, c’est une dépression « endogène ». On sait aussi qu’il y a une prédisposition génétique, qui explique que, devant le même traumatisme, certaines personnes vont commencer une dépression et pas d’autres.
On est en train de découvrir qu’il existe un lien entre notre microbiote (les bactéries que nous avons naturellement dans l’intestin) et la dépression. Mais de quelle façon cela agit, ce n’est pas encore clair. Enfin, on a constaté qu’une inflammation dans l’organisme pouvait la favoriser. Des travaux sont en cours pour comprendre la chaîne de cause à effet.
La dépression se prend en charge à la fois grâce à des médicaments, les antidépresseurs, qu’il faut prendre en général pendant au moins six mois, davantage si ce n’est pas le premier épisode. On y associe la psychothérapie, c’est-à-dire un accompagnement par un psychologue ou un psychiatre pour travailler sur les humeurs et l’anxiété. Ces traitements sont efficaces pour la grande majorité des patients !
Dans les cas les plus sérieux, il faut être hospitalisé et parfois recevoir des électrochocs (un courant électrique que l’on fait passer sous anesthésie) afin de stimuler les neurones pour entamer la guérison. De nouveaux traitements anti-inflammatoires ou agissant sur le microbiote sont à l’étude ; on progresse chaque année pour aller vers des médicaments adaptés à chaque cas.
Pour l’entourage, il faut beaucoup de patience et de force, et bien comprendre que le malade ne fait pas exprès d’être plus lent, de n’avoir envie de rien, de ne rien pouvoir décider, c’est son cerveau qui ne transmet plus l’information correctement !
Dr Anne-Sophie Biclet
Actuailes n° 139 - 15 décembre 2021
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