L’expulsion récente de notre ambassadeur à Bamako marque un tournant et constitue un véritable affront. Nos soldats quitteront-ils aussi le Mali ?
Le Mali est une ancienne colonie française devenue indépendante en 1960. Très rapidement après le départ des Français, des combats éclatent entre Touaregs, nomades du nord du pays, et Bambaras du sud, autrefois asservis par les premiers. Pendant soixante ans, guerres et trêves se succèdent jusqu’en 2013, où les Touaregs, alliés à des djihadistes, font fuir l’armée malienne du nord. Ils menacent alors la capitale, Bamako. À la demande des Maliens, l’armée française intervient et repousse les djihadistes. À cette première opération, appelée Serval, succède Barkhane dont nous vous avons parlé dans le dernier numéro (cf. n° 141).
La colère des Maliens
Le Mali est actuellement dirigé par des militaires très agressifs contre la France, qui les désapprouve pour avoir violemment chassé le président élu. Il n’y a pas eu d’élection depuis. De plus, ces militaires se sont rapprochés de la Russie pour lutter contre les djihadistes. Ces mercenaires russes, c’est-à-dire des soldats qui se battent pour de l’argent, ont mauvaise réputation et se font généralement payer en prenant le contrôle de mines – le Mali est très riche en or. Ils ont pour mission d’instruire les soldats maliens et de les accompagner au combat. Enfin, le gouvernement malien multiplie les contraintes pour les Français et les Européens dans leur guerre au nord du pays contre les terroristes. Alors, pourquoi rester combattre et perdre des soldats dans un pays qui ne veut plus de nous ?
Risque de chaos
Un départ des militaires français aurait pour conséquence le départ d’autres pays européens et africains. L’objectif des Maliens pourrait être alors de reconquérir le sud. La tentation serait grande de se venger des Touaregs, qui les ont mis en déroute de nombreuses fois. Mais l’armée malienne en a-t-elle les moyens ? Ses soldats, peu combatifs, ont tendance à fuir quand les affrontements sont trop durs. Ils ont peu de matériel moderne, en dehors de celui utilisé par les Français à leur profit. À l’inverse, les Touaregs sont de redoutables guerriers qui ne craignent pas la mort. L’autre tentation des militaires maliens serait de faire la paix avec les terroristes, qui auraient alors la possibilité de reconstituer des sanctuaires djihadistes au nord.
Quoi qu’il arrive, le Mali connaîtrait une période d’instabilité, voire de chaos. Les conséquences seraient nombreuses pour cette région pauvre : attaques terroristes dans les pays voisins, famines, émigration massive et prolifération des trafics. C’est la raison pour laquelle, si la France quitte le Mali, elle devrait renforcer son dispositif militaire dans les pays limitrophes : Niger, Côte-d’Ivoire et Sénégal.
Même si rien n’est définitif à ce stade, la situation au Mali est un échec pour la politique étrangère française qui n’a pas su trouver de solution alors que les victoires militaires le permettaient. Le temps où un président français, François Hollande, était acclamé par des milliers de Maliens reconnaissants, semble, en effet, très lointain.
Actuailes n° 142 - 9 février 2022
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