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Cambodge - La rivière sans source

Cambodge - La rivière sans source

05-04-2022 à 10:26:33

Plus grand lac d’eau douce d’Asie du Sud-Est, le Tonlé Sap est le lieu d’un mouvement hydrologique unique au monde, vital pour la population du Cambodge.
Mais ce fragile équilibre est aujourd’hui menacé.

Prenant sa source dans l’Himalaya, le Mékong dessine la géographie de la péninsule indochinoise. La vie y est rythmée par deux saisons, sèche (de novembre à mai) et humide (la mousson, de mai à novembre). Au Cambodge, ce cycle annuel se matérialise par un régime d’écoulement alternatif d’un cours d’eau sans source, avec un « retournement des eaux » deux fois par an.

À la saison sèche, le Tonlé Sap est peu profond et occupe une superficie d’environ 2 700 km2 (la taille du Luxembourg) ; les eaux s’écoulent vers le fleuve. Avec la fonte des neiges himalayennes et les pluies de mousson, le Mékong entre en crue, le courant s’inverse et le fleuve vient remplir le lac qui sert de déversoir. Sa superficie est multipliée par six et sa profondeur peut atteindre neuf mètres.

Le peuple khmer qui vit sur ces rives s’est adapté à cet environnement. Les maisons sont construites sur des radeaux ou sur pilotis, et les habitants se regroupent dans des villages flottants ; ils sont pêcheurs en saison humide, les poissons qui y cherchent refuge fournissant 60 % des apports alimentaires de toute la population ; ils sont agriculteurs en saison sèche, les sédiments laissés au retrait des eaux fertilisant naturellement les forêts et rizières.

L’eau devient richesse

« C’est quand le puits est sec que l’eau devient richesse. » Long de plus de 4 500 km, « mère de tous les fleuves », le Mékong traverse six pays, faisant aussi office de frontière naturelle. Quatre d’entre eux (Laos, Thaïlande, Cambodge et Vietnam) se sont regroupés au sein d’une commission internationale, pour une gestion durable et concertée de cette ressource vitale pour près de cent millions de personnes.

Problème : la Birmanie et, surtout, la Chine ont décidé de ne pas en faire partie. Or, depuis le début des années 2000, six barrages hydro-électriques ont été construits dans la province chinoise du Yunnan, en amont du fleuve, et deux sont encore en construction. La Chine a « la main sur le robinet » : elle possède la source, et c’est désormais elle qui dispose des réserves d’eau : elle contrôle en partie le débit du fleuve. De sa bonne volonté dépend la préservation des équilibres naturels d’écosystèmes millénaires, mais aussi l’activité économique et la sécurité alimentaire des régions en aval.

Depuis trois ans, on observe aussi une baisse sensible des précipitations en période de mousson, signe avant-coureur d’un changement climatique à l’œuvre. Le Tonlé Sap se vide et se remplit, mais pour combien d’années encore ?

Emmanuel

Actuailes n°145 - 6 avril 2022


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