L’approvisionnement de l’Europe en gaz, notamment venu de Russie, est un sujet dont nous entendons parler depuis déjà plusieurs mois, et qui risque de nous occuper une bonne partie de l’hiver. Regardons de plus près comment ce gaz arrive en Europe !
Une des clefs de la dépendance énergétique de l’Europe envers la Russie réside dans le fait que le gaz et le pétrole se transportent de manières très différentes.
Le pétrole est liquide lorsqu’il est extrait et nombre des produits issus de son raffinage, comme l’essence ou le gazole pour les voitures, ou le kérosène pour les avions, le sont aussi. Il est donc techniquement simple de les transporter dans d’immenses bateaux, dont la destination peut varier en fonction du lieu de consommation ou des prix d’achat proposés dans les différents pays. Si l’Europe manque de pétrole, elle peut faire venir davantage de bateaux pour remplir ses stocks.
Il en va tout autrement pour le gaz. Pour transporter le gaz par bateau dans des quantités importantes, il faut le refroidir jusqu’à ce qu’il soit liquide, lui aussi. C’est ce qu’on appelle le gaz naturel liquéfié. Cela implique donc de fabriquer des bateaux réfrigérés et des infrastructures spécifiques pour le refroidir avant de le mettre dans le bateau, puis pour le réchauffer à son arrivée. Tout cela renchérit le coût du transport, c’est pourquoi la majeure partie du gaz est aujourd’hui transportée par de longs tuyaux, appelés gazoducs.
Le principe du gazoduc est de pousser le gaz sous pression d’un lieu d’extraction vers un lieu de consommation. Comme une grande paille dans laquelle vous soufflez de l’air ! Les distances sont si importantes qu’il faut prévoir régulièrement des stations de compression. Ce sont des lieux où des turbines très similaires à celles formant les moteurs des avions à réaction filtrent le gaz, le nettoient, le mélangent éventuellement avec un autre gaz qui lui donne son odeur pour des raisons de sécurité, puis le compriment pour le trajet suivant.
C’est une méthode très efficace, mais elle n’offre pas la flexibilité des bateaux : par définition, le gaz fabriqué sur un lieu est forcément livré au bout du gazoduc partant de ce lieu. Pour l’Europe, on a par exemple choisi de relier dès les années 1960 les champs gaziers russes à l’est de l’Europe : soit par la mer du Nord, soit par la Biélorussie, soit par l’Ukraine et la Pologne. En bloquant ces pipelines, la Russie peut donc couper une grosse partie de l’approvisionnement en gaz de l’Europe de manière durable, car cela prendrait très longtemps de fabriquer un nouveau gazoduc ou un nouveau terminal pour décompresser le gaz liquéfié.
Malo du Bretoux
Actuailes n°150 - 28 septembre 2022
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