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La légalisation de l'euthanasie ?

La légalisation de l'euthanasie ?

30-09-2022 à 17:01:08

Le gouvernement a lancé ces derniers jours une « consultation nationale » en vue de faire évoluer la loi sur la fin de vie, et de légaliser l’euthanasie ou le suicide assisté, interdits en France.

Qu’est-ce que l’euthanasie ?

L’euthanasie est l’utilisation des procédés qui permettent d’accélérer ou de provoquer la mort de malades incurables qui souffrent et souhaitent mourir. Elle est pratiquée par les médecins, et est autorisée dans certains pays d’Europe comme les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne. Le suicide assisté est le fait de fournir à une personne les moyens de provoquer sa mort ; ce n’est plus le médecin qui agit, mais le patient lui-même avec son aide. Il est autorisé notamment en Suisse.

 

La loi bioéthique française

Actuellement, la loi de bioéthique française (celle qui donne le cadre des actes de médecine et en rapport avec la vie et la santé humaines), appelée loi Claeys-Leonetti, interdit ces deux pratiques. Elle demande le développement d’unités de soins palliatifs, c’est-à- dire des unités d’accompagnement des malades incurables (qu’on ne pourra pas guérir de leur maladie), qui ont pour but de soulager la douleur physique, d’aider au confort psychique et physique du patient et de maintenir un lien avec d’autres à travers l’intervention de bénévoles, de psychologues, d’aumôniers… en plus de l’équipe médicale. À la toute fin de la vie, lorsque la souffrance physique peut être trop importante pour des traitements habituels, la loi autorise la « sédation profonde terminale  »,  c’est-à-dire  que  l’on peut injecter au patient des antidouleurs très puissants, mais qui vont le faire dormir et qui peuvent avoir pour effet secondaire d’accélérer un peu l’arrêt de la respiration et du cœur. On estime que cet effet indésirable ne doit pas être recherché, mais qu’il est acceptable si le but est d’abord de soulager les douleurs du patient.

 

Les conséquences d’un changement

Autoriser l’euthanasie serait un changement très profond de notre rapport à la personne malade ou mourante, et de notre vision de la médecine. C’est la raison pour laquelle le Conseil national de l’Ordre des médecins vient de se prononcer contre cette autorisation. Pourquoi ? D’abord, parce que notre serment d’Hippocrate (que chaque médecin prononce au début de sa carrière) nous fait des serviteurs de la vie humaine ; notre mission n’est pas de choisir quand quelqu’un doit mourir, mais de soigner les patients, y compris les mourants, pour leur prodiguer le meilleur bien-être possible. Si nous commençons à dire que certaines vies doivent s’arrêter et que nous prenons la responsabilité de le faire, nous ne sommes plus des soignants, et nous prenons le risque d’évaluer la vie humaine. On peut d’ailleurs constater que, dans les pays qui ont légalisé l’euthanasie, la loi évolue régulièrement, puisqu’en Belgique, par exemple, on peut la pratiquer désormais à n’importe quel âge et que des malades en dépression sévère (qui n’allaient pas mourir de leur maladie, mais qui éprouvaient une grande souffrance psychique) ont pu l’obtenir.

Ensuite, parce que légaliser l’euthanasie, alors que nous n’avons pas du tout respecté la loi qui demande de créer beaucoup plus d’unités de soins palliatifs, à l’hôpital ou à domicile, c’est risquer de « se débarrasser » des personnes souffrantes sans leur accorder la place et l’attention qu’elles méritent, sans se donner les moyens qu’elles meurent de façon pleinement humaine , c’est-à-dire entourées de l’attention d’autres hommes, et alors que les derniers moments d’une vie sont très importants.

À ce jour, les médecins ont une «  clause  de  conscience  »,  qui  les autorise à refuser un acte qui ne leur semble pas compatible avec leur profession. Mais c’est toute la société qui doit se demander si ceci est compatible avec le respect de la vie humaine, et de sa dignité. 

Dr Anne-Sophie Biclet

Actuailes n°150 - 28 septembre 2022


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