Disparu sur le front de Peggy Boudeville

À partir de 13 ans.

Armand est trop jeune pour s’engager mais il trouve le moyen de devenir la mascotte d’un régiment au plus près du feu. Il a refusé de dire au revoir à son père mobilisé et s’en veut secrètement. La boue, les chairs déchiquetées par les obus, la mort et la souffrance deviennent son quotidien à lui aussi.

Lucie, sa mère, après son époux Léopold, porté disparu, pense avoir perdu son fils. Comment garder l’espérance, la « petite sœur immortelle » de Charles Péguy ? Avec énergie, Lucie redresse la tête. Elle ne laissera pasla chapellerie familiale prendre la poussière. Cette âme ardente, créative, va en modifier le décor et créer une fresque éclatante de toutes les couleurs qui se sont éteintes dans son cœur.

Épargné par un obus grâce au sacrifice d’un poilu qui l’a pris en affection, Armand accompagne jusqu’à un hôpital de la Croix-Rouge un camarade à l’article de la mort. Là, il fait la rencontre d’un ange, Blanche. Cette infirmière de son âge le conduit à un homme profondément abîmé, au visage défiguré et l’âme meurtrie, sa « petite momie ». Qui se cache sous les bandelettes, dans un mutisme absolu ?

La guerre brise les corps, les âmes et les amours. Mais, quand la providence s’en mêle, les écheveaux peuvent parfois se retisser au-delà des espérances.

Dans un style vigoureux, avec des dialogues parfois crus, Peggy Boudeville suscite l’émotion et la compassion enverslessoldats aux chairs broyées, aux « gueules cassées ». Elle met au service de ce palpitant roman de transmission l’art de l’évocation des lieux, des actions et des personnages qu’elle possède à merveille.

Des sources historiques détaillées en fin d’ouvrage sont un vrai plus, notamment sur l’engagement illégal de jeunes adolescents pendant la Grande Guerre. Elle retrace brièvement la bataille de la Somme, cadre du roman. Le rôle des femmes à l’arrière est mis en valeur, ainsi que le contexte social. Sans oublier le parc d’attractions Luna Park ouvert en 1909 où Léopold avait prévu d’emmener son fils Armand pour son anniversaire, si la mobilisation générale n’avait pas sonné la fin du bonheur familial.

 Valérie d’Aubigny

Actuailes n°153 - 30 novembre 2022

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