En raison d’une faible production nationale, la France pourrait connaître des coupures de courant électrique cet hiver. Cette situation inquiète beaucoup nos compatriotes, que le gouvernement a tenté maladroitement de rassurer.
Les raisons
De manière très simple, les coupures auraient lieu en cas de demande des particuliers et des entreprises supérieure à ce que le réseau peut fournir. Faute d’assez d’électricité disponible, il faudrait alors faire baisser la consommation par des coupures imposées. Comme nous vous l’expliquions dans notre numéro 151 du 12 octobre, le nucléaire est en France la principale source d’électricité avec 70 % des besoins couverts. Le nucléaire produit une électricité peu chère et nous rendait autonome vis-à-vis de l’étranger.
Malheureusement, depuis vingt ans, sous la pression des écologistes, les différents gouvernements ont sacrifié cette filière d’excellence nationale, qui faisait référence dans le monde entier. L’objectif fixé était d’augmenter la part des énergies renouvelables – éoliennes et panneaux solaires – et de démanteler progressivement les centrales nucléaires. Le président François Hollande avait ainsi décidé, en 2011, de fermer la centrale de Fessenheim, qui parvenait à produire l’équivalent de 1 800 éoliennes. En passant un accord politique avec les écologistes, il prévoyait de fermer 24 réacteurs avant 2025. Emmanuel Macron a poursuivi l’œuvre de son prédécesseur. Les investissements ont donc baissé, aussi bien dans la recherche que dans la production.
La crise énergétique consécutive à la guerre en Ukraine, avec l’arrêt des livraisons de gaz russe, a souligné l’erreur commise. Mais il va être long de remonter la pente. De plus, la crise sanitaire a perturbé le programme d’entretien des centrales. Puis un problème de corrosion est apparu sur certains réacteurs. C’est la raison pour laquelle 37 % du parc nucléaire est aujourd’hui à l’arrêt. Or ce n’est pas le bon moment, car la consommation a tendance à monter en hiver avec la baisse des températures.
Les modalités
Face au risque de pénurie, le gouvernement a précisé les modalités de potentielles coupures électriques. Elles concerneraient 60 % des Français, mais aucun site critique, comme par exemple les implantations militaires ou les hôpitaux. Les personnes habitant à proximité de ces infrastructures préservées seront épargnées, car il n’est pas possible de faire la distinction au sein d’un même quartier. Ainsi, les campagnes pourraient être beaucoup plus touchées que les grandes villes comme Paris. La Corse est également exclue, car elle est reliée à l’Italie et produit sa propre électricité. Les coupures dureraient deux heures, pendant les pics de consommation : 8h/13h et 18h/20h. Elles ne toucheraient aucun département en entier, et jamais deux fois les mêmes personnes.
Enfin, les 3 800 patients à domicile, dont la vie repose sur un appareil médical branché au secteur (respirateur artificiel, par exemple) ne seraient pas concernés, même si un doute persiste en raison de déclarations contradictoires entre le gouvernement et l’entreprise qui livre l’électricité. Les risques de coupure seraient annoncés trois jours avant, confirmés la veille par département, et avant 17 h les personnes concernéesseraient averties en allant sur un site Internet.
Les conséquences
Elles seraient nombreuses et perturberaient la vie des familles et des entreprises. Tout d’abord, les écoles pourraient fermer le matin, faute de chauffage et de lumière. Lestransports en commun pourraient être très perturbés par l’absence de moyens de signalisation.Il en va de même pour les automobilistes qui n’auraient plus de feux rouges pour réguler la circulation. Enfin, la situation serait catastrophique pour artisans, commerçants et entreprises qui devraient cesser momentanément leur activité. Les agriculteurs sont particulièrement inquiets pour le chauffage de certains élevages, leur arrêt pouvant faire des ravages chez les animaux. Notons que l’explosion actuelle du prix de l’électricité incite des usines à réduire leur production. Ainsi, le groupe alimentaire qui produit les cassoulets William Saurin devra mettre 800 de ses 1 200 salariés au chômage partiel en janvier, sa facture d’énergie ayant été multipliée par dix. Dans l’agriculture, le problème est le même, d’autant qu’il existe une forte concurrence des pays où l’électricité est quatre fois moins chère, comme l’Allemagne.
Que faire ?
Les différents ministres n’ont pas réussi à calmer les inquiétudes. En effet, leurs annonces sont souvent contradictoires, voire erronées. Les Français se sont donc rués sur les groupes électrogènes et le matériel de camping. Interrogés, ils expriment une certaine colère de voir leur pays prendre le chemin du sous-développement, les coupures d’électricité étant régulières dansles pays pauvres. Pour finir, tout dépendra des températures hivernales et de la capacité des centrales nucléaires à accélérer leur redémarrage. À plus long terme, cette situation interroge sur les choix politiques qui ont été effectués : n’est-il pas temps de réorienter franchement nos investissements versle nucléaire ?
Julien Magne
Actuailes n°154 - 14 décembre 2022
Actuailes 2024 © Tous droits réservés. Conditions d'utilisation with & by Website-modern - Se connecter