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L’ Allemagne se cherche un nouveau modèle

L’ Allemagne se cherche un nouveau modèle

28-02-2023 à 14:45:06

Ce 25 février, le chancelier allemand Olaf Scholz entamait une visite officielle en Inde pour y renforcer les liens de l’Allemagne avec elle. Elle fait suite à sa récente visite en Chine et s’inscrit dans un contexte où l’Allemagne est confrontée à la fin d’un modèle réussi depuis 20 ans.

2022 fut un « annus horribilis » : la baisse surprise du PIB et la suppression d’emplois par le groupe BASF ne sont que les derniers signaux de la liste. Serait-ce la fin d’un âge d’or où, depuis 20 ans, le PIB par habitant des Allemands dépassait de 11 % celui des Français ?

Son modèle économique

Depuis 20 ans, Le modèle allemand reposait sur les Großkonzern (groupes mondiaux aux marques célèbres) et le Mittelstand (nombreuses grosses entreprises familiales) qui employaient une main-d’œuvre qualifiée (grâce au système de l’Ausbildung qui forme les jeunes de 15 ans pour les métiers technologiques).

Ces employés étaient bien payés, car spécialisés dans la fabrication à forte valeur ajoutée (voitures haut de gamme, chimie de spécialité et machines-outils).

Des produits bénéficiant de coûts de fabrication bas grâce au gaz russe, vendus en Europe sans droits de douane (grâce à l’UE) ni souci de taux de change (grâce à l’Euro) ou exportés en Chine ainsi qu’aux USA.

La paix sociale était garantie par une inflation basse et le plein emploi ; les comptes publics étaient positifs. En effet, l’Allemagne a toujours maîtrisé le nombre de ses fonctionnaires, les montants de l’aide sociale et les coûts de l’immigration.

De plus elle n’a jamais dépensé d’argent dans la protection nucléaire, ayant confié sa sécurité à l’armée américaine, et laissé la responsabilité des « OPEX », la sécurité extérieure de l’UE aux Grecs, aux Italiens et, surtout, aux Français.

Un équilibre compliqué

Depuis 2022, l’Allemagne a dû réduire ses achats de gaz russe et ne peut plus compter sur le pipeline Nord Stream 2 depuis son sabotage. Elle doit désormais acheter du gaz liquéfié aux USA et aux pays arabes, tout en construisant un terminal géant dans le port gazier de Willehmshaven. En outre, l’inflation historique (8 % en 2022 !) a forcé l’État à débloquer 65 milliards d’euros pour aider les citoyens.

De plus, face à la guerre en Ukraine et à la Pologne (qui a décidé de devenir la première armée de terre d’Europe sous 10 ans), Olaf Scholtz a dû promettre 100 milliards d’euros pour des armements nouveaux. La formule qui agite la presse est désormais « Kinder oder Panzer » ? Le social ou la guerre ?

De plus, la Chine possède désormais ses usines et produit ses propres voitures, qu’elle vend dans le monde entier, même en Europe. Et les USA ont annoncé l’« IRA », un plan colossal de protectionnisme qui favorisera le made in USA et qui inquiète beaucoup l’Allemagne ; les industriels allemands vont implanter de nouvelles usines aux États-Unis pour y bénéficier de subventions étatiques et d’une énergie moins chère. Pire, l’UE annonce l’interdiction de fabriquer des voitures diesel et essence en 2035 ; or l’industrie allemande (et européenne) est en retard dans l’électrique qui dépend de technologies étrangères, de minéraux chinois et de subventions étatiques. Même Elon Musk annonçait cette semaine dans le quotidien FAZ qu’il revoyait ses ambitions à la baisse pour sa nouvelle « giga factory » de batteries Tesla à Berlin.

Pendant ce temps, la main-d’œuvre allemande vieillit et compte de plus en plus d’immigrés, la traditionnelle concorde sociale issue de la « cogestion » est remplacé par une relation plus vindicative et des syndicats plus durs, tandis que les grèves sont désormais fréquentes. Et l’Ausbildung souffre du désintérêt croissant des jeunes générations pour les métiers techniques et du rejet par certains de la croyance dans le progrès technologique ; Vorsprung durch Tecknik (le slogan de la marque Audi) trouve moins d’écho dans la cette génération.

Reste la stabilité politique force historique du pays ; succédant à des chanceliers qui ont gouverné pendant 16 ans (Helmut Kohl), 7 ans (Gerard Schroeder) et 16 ans (Angela Merkel), Olaf Scholz doit encore prouver qu’il a le charisme et la vision nécessaire pour présider aux destinées des Allemands sur le long terme.

Siegfried

Actuailes n°158 - 1er mars 2023


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