Wag the dog pourrait se traduire par « détourner l’attention », « distraire », et c’est bien le but des Hommes d’Influence dans ce film qui est aussi une mise en abyme du système hollywoodien.
À douze jours de sa possible réélection, le président des États-Unis fait la « une » des grands quotidiens et les choux gras de son adversaire : il a été surpris dans une situation inconvenante. Sa conseillère en communication appelle aussitôt Conrad Brean (Robert de Niro), l’expert de l’ombre qui règle toutes les situations. Pour allumer un contre-feu, il faut proposer au public un sujet inquiétant et plausible : rien de mieux qu’une menace contre le territoire US ! Conrad embauche alors un producteur de film à succès, Stanley Motts (Dustin Hoffman) qui va orchestrer avec génie cette campagne de désinformation.
La désinformation et la propagande sont des armes politiques bien connues pour influencer l’opinion. Les USA ne sont pas en reste et la manipulation d’images est une triste réalité, l’affaire des couveuses au Koweït en 1991 en est un exemple glaçant. En raison d’un fait réel analogue, la réalité a dépassé la fiction et ce film prophétique est rentré dans l’histoire du cinéma ! L’œuvre aborde toutefois deux autres aspects. Le premier concerne la description du processus créatif. Motts, mégalomane, s’amuse de la situation, y voit un défi de production et s’entoure aussitôt de ses meilleurs éléments pour inventer une histoire crédible. Une nuit blanche suffit à ces artistes pour jeter les bases solides de leur création. Pour eux, tout est produit à vendre, y compris un président, peu importe lequel. Le second trait qui est abordé en même temps rend ce film un peu troublant : qui manipule qui ? Les politiques ? Les médias ? Hollywood se dénonce elle-même dans une production purement hollywoodienne ! Deux acteurs de renommée internationale et un producteur accompli se délectent à nous montrer que la politique est un spectacle, et que le spectateur inculte (« Pourquoi l’Albanie ? – Que connais-tu de ce pays ? – Rien ! – Voilà ! ») est d’autant plus manipulable. Il faut croire qu’à Hollywood on ne doute de rien, surtout pas de son propre cynisme !
Catherine Bertrand
Actuailes n°160 - 29 mars 2023
Actuailes 2024 © Tous droits réservés. Conditions d'utilisation with & by Website-modern - Se connecter