Vous avez entendu parler d’Hollywood, de Bollywood (son équivalent en Inde), mais avez-vous entendu parler de Nollywood, surnom donné à l’industrie cinématographique du Nigéria et produisant près de 2 500 films par an ?
S’il ne représente que 2 % du commerce mondial de films, le cinéma africain monte doucement mais sûrement en puissance, comme l’a démontré la 76e édition du festival de Cannes. Peut-il espérer concurrencer les blockbusters occidentaux ?
Le continent africain est un continent à la démographie galopante et très connecté, offrant des débouchés immenses pour cette industrie. Cela, couplé à la généralisation des nouvelles technologies, au coût abordable des équipements numériques et à la montée en puissance des plateformes en ligne, permet aujourd’hui à une nouvelle génération de cinéastes africains d’émerger. La crise du covid, ayant plus secoué l’Occident que l’Afrique, a ainsi rendu le cinéma africain plus concurrentiel dans un marché mondial en berne.
Développement des festivals
À l’image de Nollywood, de multiples festivals voient le jour sur le continent. Tous les deux ans, le Burkina Faso retrouve de la joie à l’occasion de l’incontournable FESPACO (festival panafricain du cinéma de Ouagadougou). La dernière édition, achevée en mars 2023, a permis de dresser un état des lieux. La production demeure dynamique et se modernise, avec de nombreux sacres récents à l’international : « Atlantique », de la Franco-sénégalaise Mati Diop, a remporté un prix à Cannes en 2019 ; « Sira », de la Burkinabé Apolline Traoré, a été sacré en janvier 2023 à la Berlinale ; enfin, deux films ont été en lice pour la récente palme d’or à Cannes, chiffre remarquable, bien que le dernier sacre d’un pays africain remonte à… 1975 avec l’Algérien Lakhdar Hamina.
Des obstacles à surmonter
Avec 5 milliards de dollars de recettes annuelles, sur un chiffre d’affaires potentiel estimé à 20 milliards, cette industrie demeure sous-développée par manque de considération et de financements (alors qu’elle pourrait contribuer à plus de 20 millions de créations d’emplois).
Le cinéma africain se heurte aux faiblesses structurelles du continent : désintérêt des investisseurs occidentaux, forte censure attestant d’une limitation de la liberté d’expression, piratage massif engendrant 50 % de pertes des recettes espérée, et faible nombre d’écrans de cinéma par habitant, malgré les efforts menés (Canal + a ainsi lancé une chaîne de cinémas à bas prix dans les pays d’Afrique francophone). On dénombre 1 écran de cinéma au Mali, 5 au Burkina ou 6 en Côte-d’Ivoire, ce qui demeure trop peu. Pour finir, « tourner dans un pays instable, où il y a des manifestations et des émeutes est moins évident que dans un studio américain », ajoute avec réalisme un producteur soudanais.
Le cinéma africain devra donc miser sur ses atouts propres pour espérer mettre en valeur sa production déjà riche et variée : aller capter les distributeurs avec des films ancrés en Afrique, mais à portée universelle. L’obtention d’une deuxième palme d’or est à ce prix.
Guillaume P.
Actuailes n°163 - 16 jion 2023
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