Le président Emmanuel Macron a nommé un nouveau Premier ministre en la personne de Gabriel Attal. Est-ce pour autant le signe d’un changement de politique ?  

Élisabeth Borne a donc cédé sa place. Venue de la gauche, elle a conduit la politique du président Emmanuel Macron dans des conditions difficiles. En effet, elle ne disposait pas de majorité à l’Assemblée nationale pour faire voter ses lois. La réforme des retraites, ou encore la loi immigration, ont illustré cette difficulté à gouverner. Le président a donc choisi un nouveau Premier ministre pour donner un second souffle à son programme. 

Gabriel Attal, jeune surdoué? 

Qui est Gabriel Attal, dont l’ascension semble fulgurante? À 34 ans, il est en effet le plus jeune Premier ministre de la Ve république. Il est intéressant de noter que l’addition des âges de Gabriel Attal et d’Emmanuel Macron – 80 ans – reste en deçà de celui du président américain Joe Biden et ses 81 ans. Il était auparavant ministre de l’Éducation nationale, où il a beaucoup fait parler de lui en annonçant de nombreuses réformes pour remédier à l’écroulement du niveau des élèves.  

Gabriel Attal a suivi un parcours très classique pour un homme politique français. Il est diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, autrement appelé Sciences-Po. Il a en revanche échoué à obtenir sa licence de Droit à l’université d’Assas. Issu d’une famille aisée de gauche, il milite dès ses 17 ans au Parti socialiste. En 2016, il rejoint Emmanuel Macron et son parti, La république en marche, dont il est le porte-parole en 2018. Il est élu député en 2017 dans les Hauts-de-Seine (92). En 2018, il est chargé du Service National Universel comme secrétaire d’État, devenant à 29 ans le plus jeune membre d’un gouvernement de la Ve République. Il est très à l’aise dans les médias où il a toujours défendu ardemment Emmanuel Macron et sa politique. 

 

Le gouvernement 

Gabriel Attal prend la tête d’un gouvernement resserré, qui devrait toutefois grossir avec le temps. Il dirigera l’action de 14 ministres, 7 hommes et 7 femmes. Beaucoup étaient déjà présents dans l’équipe précédente comme Bruno Le Maire à l’Économie, Gérald Darmanin à l’Intérieur (sécurité-police), Éric Dupond-Moretti à la Justice ou encore Sébastien Lecornu aux Armées. Deux femmes issues de la droite rejoignent ce gouvernement. Il s’agit de de Catherine Vautrin au ministère du Travail et de la Santé et de Rachida Dati comme ministre de la Culture. Il faut enfin noter la grosse promotion d’Amélie Oudéa-Castera dont le ministère regroupera l’Éducation nationale, les Sports et les Jeux olympiques.  

 

Les défis 

 

Le président Emmanuel Macron a demandé à ce gouvernement des résultats rapides.  

Les défis ne manquent pas avec une situation économique difficile, et de gros déficits dans le budget de l’État. L’immigration massive et l’insécurité sont également un sujet de préoccupation majeure des Français. Cette équipe devra également poursuivre les efforts déjà commencés pour remonter le niveau des élèves à l’école. Enfin, les Jeux olympiques de Paris cet été sont un rendez-vous majeur à ne pas rater. 

Emmanuel Macron et ses ministres sont plutôt impopulaires et, plus grave, le gouvernement ne dispose pas d’une majorité de députés à l’Assemblée nationale. Il est donc compliqué de faire voter des lois sans de nombreux compromis. Les sondages pour les prochaines élections européennes dans cinq mois sont mauvais pour le parti présidentiel, la liste du Rassemblement national de Jordan Bardella disposant d’une large avance avec 30% des votes. Cette élection aura valeur de test de popularité pour Gabriel Attal et sa politique. 

 

Virage à droite ? 

Même s’il reconduit la plupart des anciens ministres, pour beaucoup issus de la droite, ce nouveau gouvernement est marqué par le départ de personnalités issues de la gauche, tout d’abord Élisabeth Borne, et l’arrivée de politiciens de droite. Il s’agit surtout de Rachida Dati, qui vient du pari Les Républicains, et qui est l’actuelle maire du VIIe arrondissement de Paris.  

Avec ces choix, Emmanuel Macron semble accompagner la droitisation des Français qui demandent plus d’ordre. En revanche, si les ministres devraient mener une politique plus à droite en économie, sur l’immigration ou sur l’école, des mesures emblématiques de la gauche devraient également être promues, comme l’euthanasie et l’inscription de l’avortement dans la constitution.  

Pour finir, Emmanuel Macron devrait donc être fidèle à sa politique du «en même temps», mi à droite, mi à gauche, très populaire chez ses électeurs, essentiellement âgés et aisés.  

 

Derrière une communication très élaborée, la nomination de ce nouveau gouvernement est moins spectaculaire que ce qui avait été annoncé. Il s’agit avant tout d’une équipe stable, déjà très présente dans le gouvernement d’Élisabeth Borne. De plus, sans majorité au Parlement, il sera difficile de mener une politique qui produise rapidement des résultats. Les défis sont pourtant immenses. 

Le savais-tu? 

Le gouvernement a pour mission de déterminer et conduire la politique de la France. Il dispose pour cela de l’administration et de la force armée (mais pas de l’armée, dont le président est le chef). Le gouvernement propose des lois au Parlement, certaines étant obligatoires comme les lois de finance. Le gouvernement est responsable devant le Parlement, qui peut le révoquer en votant une motion de censure.  

Chaque semaine, le président préside le conseil des ministres, où sont nommés de nombreux fonctionnaires et signés des décrets. 

 

L’hôtel de Matignon 

La résidence officielle du Premier ministre depuis 1935 est un magnifique hôtel particulier situé dans le VIIe arrondissement de Paris, l’hôtel de Matignon. Il fut la propriété de grands familles aristocratiques, et le siège de l’ambassade d’Autriche. Il dispose d’un parc de 2,5 hectares, où il est de tradition que chaque Premier ministre plante un arbre. 

Julien Magne

Actuailes n°170 - 17 janvier 2024