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Il y a 70 ans: la fin de l’Indochine française

09-04-2024 à 15:24:00

En 1954, la bataille de Diên Biên Phu sonnait le glas de trois siècles de présence française en Asie du sud-est.  

XVIIIe siècle, les missionnaires  

L’Indochine française, c’est d’abord une histoire de missionnaires. Les premiers Français qui pénètrent dans la péninsule sont des prêtres de la Compagnie de Jésus ou de la Société des Missions Étrangères. Le plus connu d’entre eux, le père Alexandre de Rhodes, résida dans la péninsule de 1624 à 1648; à son retour en France, il avait appris l’histoire et la langue de ce peuple, et la géographie de son pays.  

Un siècle plus tard, Louis XVI offrait sa protection au roi de Cochinchine. Contre les services de quatre frégates et d’un millier de soldats, la France recevait en échange la souveraineté sur quelques îles et le droit exclusif de commerce sur tout le royaume. Gia Long, le roi devenu empereur, fera par la suite la conquête du Tonkin (au nord) et de l’Annam (frange littorale).  

XIXe siècle, le corps expéditionnaire 

Ce n’est qu’à partir de 1858 que le gouvernement français s’intéresse vraiment à cette province, et décide d’envoyer son armée. D’abord, pour protéger les missionnaires et catholiques persécutés; ensuite, pour soumettre les Pavillons noirs, ces pirates et brigands du delta du Mékong qui maintiennent le Tonkin sous leur coupe, soutenus par des partisans chinois. Ce sera l’œuvre de l’amiral Courbet à la tête de l’escadre d’Extrême-Orient, et du corps expéditionnaire français, fort de plus de 40000 hommes, légionnaires, zouaves, tirailleurs et autres spahis de l’armée d’Afrique. 

En 1885, la conquête de l’Indochine est achevée. Mais, contrairement à l’Algérie, elle ne sera jamais une colonie de peuplement. À part les militaires, les fonctionnaires et quelques riches négociants, grands propriétaires fonciers et petits commerçants, peu de Français viennent s’établir si loin. L’administration française réalise la pacification en s’appuyant sur les élites locales (mandarins et lettrés). La culture française se substitue peu à peu à l’enseignement confucéen, et avec elle l’esprit de 1789, qui imprègne l’inconscient des populations autochtones, en particulier celles du nord. Elles en retiennent que l’indépendance et la liberté peuvent être obtenues de haute lutte… 

 

Les années 1950 et la décolonisation 

Lors de la Deuxième Guerre mondiale, le Japon occupe partiellement l’Indochine. Les autorités françaises, restées fidèles à Vichy, sont obligées de transiger jusqu’en 1945, faute de moyens suffisants pour défendre la souveraineté. Pendant ce temps, les nationalistes de tous bords, partisans de l’indépendance du Vietnam, se sont organisés, avec les communistes à leur tête. Ils se regroupent au sein du «Viêt-Minh», et se choisissent un chef, un intellectuel formé en Europe et en France: HôChi Minh. Sa branche armée est sous les ordres du général Giap; c’est lui qui, de 1946 à 1954, va mener aux troupes françaises une guerre d’usure, faite d’embuscades et de harcèlement, en maintenant pendant toutes ces années l’Indochine dans un état insurrectionnel permanent. «Loin des yeux, loin du cœur»: la «perle de l’Empire» est trop loin de la métropole et des préoccupations d’après-guerre. L’instabilité politique de la IVe République laisse l’Indochine dans l’indécision. En 1949, cette guerre larvée a déjà fait 15000 morts. D’Argenlieu, de Lattre, Salan: les chefs militaires les plus capables se succèdent sans trouver la solution pour «une sortie honorable».  

À la frontière nord, la Chine communiste a conquis son indépendance, et apporte désormais son aide aux combattants vietminh. Le rapport de force a basculé. La bataille de Diên Biên Phu (voir encadré) s’achève le 7 mai par une défaite, qui précipite la fin de la présence française en Extrême-Orient.  

Le 20 juillet 1954, les accords de Genève sont signés, qui mettent fin à la guerre. Le corps expéditionnaire sera dissous le 28 avril 1956, tournant la dernière page de ces trois siècles d’influence française dans cette région du monde. 

Après la France, les États-Unis essaieront à leur tour d’empêcher l’expansion du communisme dans la péninsule, sans plus de succès. Le Vietnam est réunifié et indépendant depuis 1976; il est toujours gouverné par un régime communiste. La plus grande ville du pays, «Ho-Chi-Minh-ville», a remplacé Saïgon; mais la capitale officielle est Hanoï. 

La Bataille de Diên Biên Phu

À la fin de 1953, pour empêcher le général Giap de s’emparer du nord-Laos, l’état-major français décide d’établir une base avancée dans une petite vallée entourée de collines, rapidement baptisées Béatrice, Huguette, Dominique ou Gabrielle.  

Hélas, dès le mois de janvier, l’ennemi concentre toutes ses forces sur ce point de fixation. Toute sortie se solde par un échec sanglant. La base avancée devient peu à peu un camp retranché. 10 à 15000 hommes côté français, 4 fois plus côté vietminh, sans compter le nombre de coolies, ces porteurs qui achemineront vivres et munitions à bicyclette ou à pied à travers la forêt tropicale.  

La bataille s’engage le 13 mars 1954 à 17h15. Bientôt, la piste d’aviation, prise sous le feu ennemi, est inutilisable. Le 7 mai, après 56 jours héroïques, l’ordre est donné de cesser le combat.  

8000 combattants vietminh sont morts contre 2300 côté français. Mais plus de 11000 sont faits prisonniers. Un tiers seulement reviendra vivant de cette captivité, ultime humiliation pour l’armée française. Parmi eux, quelques grands noms: Marcel Bigeard (officier parachutiste), Pierre Schoendorffer (reporter de guerre) ou encore Geneviève de Galard (infirmière convoyeuse de l’air, qui sera surnommée «l’ange de Diên Biên Phu», et qui est toujours en vie). 

 

À retrouver dans nos précédents numéros: 


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