L’idée de protéger les enfants la nuit en les empêchant de sortir sans un adulte fait son chemin.
La France connaît en effet depuis plusieurs mois une vague de violences sans précédent impliquant des enfants de moins de 15 ans. Les plus graves sont des attaques au couteau qui ont coûté la vie de plusieurs adolescents. L’État et les maires cherchent des solutions pour endiguer ce phénomène.
Une vieille histoire
Durant les périodes de guerre ou les temps de crise, l’État a souvent instauré des couvre-feux, qui consistent à interdire les déplacements dans les rues durant certaines heures, généralement la nuit. L’objectif est de permettre aux forces de l’ordre de mieux contrôler les zones sous couvre-feu.
Le premier couvre-feu remonterait à 1068 en Angleterre, et à Guillaume le Conquérant, qui souhaitait ainsi mater une rébellion. Dans notre histoire récente, les Allemands en ont abusé durant la Seconde Guerre mondiale pour freiner les activités de la Résistance. L’État a choisi cette solution durant la guerre d’Algérie (1954-1962) pour empêcher les attentats des terroristes du Front de libération nationale (FLN), qui demandaient l’indépendance. La loi qui l’autorise a été votée en 1955 et a à nouveau servi à partir de 2005 durant les nombreuses émeutes des banlieues. Durant la crise du covid en 2020 et 2021, l’État s’est appuyé sur une loi déclarant «l’état d’urgence sanitaire».
Les mineurs visés
L’instauration d’un couvre-feu pour les mineurs la nuit, c’est-à-dire l’interdiction pour eux d’être seuls dehors sans un adulte, est une idée qui se répand en France. Le ministre de l’Intérieur, monsieur Gérald Darmanin, s’est récemment déclaré favorable à sa généralisation pour les moins de 13 ans, les villes de Nice et de Béziers l’expérimentant déjà entre 23h00 et 6h00 du matin. En Guadeloupe, le couvre-feu concerne tous les jeunes de moins de 18 ans à partir de 20h00.
L’âge de 13 ans ne doit rien au hasard. La loi stipule en effet que «les mineurs de moins de 13 ans sont présumés ne pas être capables de discernement». Ces mineurs ne sont donc pas pénalement responsables de leurs actes. Ce sont leurs parents. Ils doivent donc payer les amendes de leurs enfants, qui pourront être envoyés dans des foyers si leurs parents sont jugés défaillants dans leur éducation. Cette mesure vise donc à responsabiliser les parents sur leurs obligations, et à protéger les jeunes enfants des influences néfastes, rappelant qu’il est anormal qu’un enfant soit dans la rue la nuit alors qu’il est sensé dormir pour aller à l’école le lendemain et avoir une croissance normale.
Si cette mesure ne peut pas tout régler face à ce problème profond de montée de la violence, elle pourra toutefois en atténuer certains effets. Elle relance également le débat sur la justice des mineurs, extrêmement favorable aux jeunes délinquants, qui peuvent multiplier leurs méfaits sans aucune réponse ferme de la justice. Il en naît souvent un sentiment d’impunité qui provoque des faits de plus en plus graves, le mineur ayant souvent le sentiment qu’il ne risque rien.
Julien Magne
Actuailes n°176 - 15 mai 2024
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