Les salariés à la barre de Duralex

As-tu déjà regardé ton « âge » au fond d’un verre Duralex? 

Figure-toi que l’entreprise qui les fabrique était sur le point de faire faillite depuis le printemps, après de nombreuses péripéties. 

Une entreprise sauvée par ses salariés 

Ses salariés s’inquiétaient pour leur avenir… qu’ils ont finalement décidé de prendre en main! En effet, ils viennent de créer une SCOP pour reprendre l’entreprise: une société coopérative gérée par ses propres salariés ! 

Qu’est-ce qu’une SCOP ? 

En fait, dans une SCOP (Société COopérative et Participative ou Société Coopérative de Production), les salariés sont les associés majoritaires: ils possèdent l’entreprise (si ce n’est en totalité, du moins en grande partie) et prennent les décisions importantes pour la gérer. Ces décisions sont votées lors de réunions annuelles des actionnaires appelées «assemblées générales», selon le principe: 1personne = 1voix. 

Cependant, les salariés ne peuvent pas faire tout ce qu’ils veulent. Le partage des bénéfices est très encadré par la loi! La SCOP a vocation à générer un profit, certes, mais surtout à être viable économiquement, c’est-à-dire à perdurer dans le temps. 

Si ce type d’entreprise n’existe sous sa forme actuelle que depuis 1978, ses origines remontent aux luttes ouvrières du 19ᵉ siècle, menées pour une meilleure reconnaissance des droits des travailleurs et l’amélioration de leurs conditions de travail. 

De 650 SCOP en 1979, on en comptait 2 635 en 2023 ! Les plus connues du grand public sont les enseignes Biocoop (magasins bio), Moulin Roty (la société de jouets), l’école de conduite ECF, ou encore Le Relais, que l’on trouve souvent dans les gares. 

La saga Duralex 

La marque Duralex a été déposée en 1945, et s’appuie sur la technique du verre trempé. Son nom serait tiré de la locution latine «Dura lex, sed lex» («la loi est dure, mais c’est la loi»), soulignant la robustesse du verre. 

Cependant, cette «star» de la verrerie a connu des heures plus glorieuses: même James Bond et Indiana Jones utilisaient à une époque des verres Duralex! L’entreprise a été rachetée en 2021, mais la situation ne s’est guère améliorée au cours des trois dernières années. La flambée des prix des matières premières, notamment à cause de l’invasion russe en Ukraine, a fortement pénalisé ce secteur. Au printemps dernier, l’entreprise a de nouveau été placée en redressement judiciaire (procédure de soutien à une entreprise qui ne peut plus faire face à ses dettes). Mais, cette fois, une proposition a été faite par les salariés eux-mêmes, soutenue par la métropole d’Orléans et la région Centre-Val de Loire: la création d’une SCOP, permettant à 226 salariés de conserver leur emploi! 

Même si les difficultés ne disparaîtront pas immédiatement pour cette entreprise du patrimoine industriel français, les salariés ont pris leur destin en main et sont désormais maîtres à bord. Espérons que, futurs agents au service de sa Majesté ou non, les enfants pourront continuer longtemps à découvrir leur âge au fond de leur verre! 

Marie de la Biche 

Actuailes n°182 - 13 novembre 2024