Ces compagnons artisans de la résurrection de Notre-Dame

Le vendredi 29 novembre, ceux qui ont reconstruit Notre-Dame ont été les premiers à contempler leur œuvre. Une récompense à la hauteur de ce qui est probablement le plus grand «chef-d’œuvre» de nos compagnons. 

Ils étaient plus de 2000 artisans à se tenir au chevet de la Dame de Pierre pendant 5 ans; parmi eux, beaucoup issus du compagnonnage. 

Qu’est-ce que le compagnonnage? 

Être compagnon, c’est la reconnaissance pour un apprenti par ses pairs d’être parvenu à un niveau de maîtrise suffisant dans la pratique d’un art donné. C’est aussi un gage de prestige. Et pour cause! Le compagnonnage vise à l’excellence. Il promeut le dépassement de soi par le travail dans un esprit de transmission et de cohésion entre artisans.  

L’aspirant-compagnon est soumis à un lent processus de perfectionnement auprès des maîtres, qui lui apprennent les différentes méthodes propres à son art. Les métiers qui lui sont ouverts sont variés. Tous dénotent d’une dimension manuelle, artisanale, voire artistique. On trouve ainsi des compagnons charpentiers, électriciens ou encore boulangers. 

Quelle est son histoire? 

C’est une pratique très ancienne, rodée et établie au fil des siècles. Il est difficile de déterminer son origine. Il est probable qu’il ait vu le jour entre les XIIe et XIIIe siècles sur les chantiers... des cathédrales! Désireux de s’affranchir de la hiérarchie rigide des corporations d’artisans, certains ouvriers s’organisèrent en sociétés d’entraide et de protection, «les devoirs», fondées selon des principes de liberté et d’itinérance. 

Aujourd’hui, il existe plusieurs fédérations. La plus importante est l’Association ouvrière des compagnons du devoir et du tour de France. En 2010, le compagnonnage fut inscrit au patrimoine mondial immatériel de l’Unesco en tant que «réseau de transmissions des savoirs et identités par le métier». 

Comment devient-on compagnon? 

La France compte aujourd’hui 4000 compagnons, et leur nombre augmente. C’est «l’effet Notre-Dame». La cathédrale a été l’écrin sur lequel nos ouvriers ont dévoilé au monde la richesse de leur savoir-faire, inspirant de nombreux jeunes en quête de sens dans leur travail. Pourtant, le chemin avant de pouvoir être désigné compagnon est long et exigeant.  

Après avoir obtenu un CAP, l’aspirant commence son Tour de France pour une durée de 5 ans en moyenne. À chaque étape, il s’instruit auprès d’un maître, et élabore pas à pas son œuvre de réception, son «chef-d’œuvre». Une fois accepté, le néo-compagnon s’inscrit dans la continuité de l’héritage des bâtisseurs des premières cathédrales.  

Notre-Dame en chiffres 

2063 jours, soit 5 ans, 7 mois et 22 jours, temps écoulé entre l’incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, le 15 avril 2019, et sa réouverture le 7 décembre 2024. La reconstruction a été rendue possible par les 846 millions d’euros de dons provenant de 340 000 donateurs du monde entier et le travail acharné des 2 000 personnes œuvrant sur le chantier. Des échafaudages de plus de 1200 tonnes ont été construits à l’intérieur de la cathédrale, montant parfois jusqu’à 27m de haut.  

Les charpentes ont été reconstruites grâce à 2000 chênes : environ 1000 pour la flèche et les travées et 1000 autres pour la charpente du chœur et de la nef. 

Les 8000 tuyaux du grand orgue ont été nettoyés et les 8 cloches du beffroi nord ont été remontées, pesant au total près de 17 tonnes.  

Briac Saint Loubert Bié

Actuailes n°184 - 11 décembre 2024