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Circulation alternée, peur sur la ville ?

Circulation alternée, peur sur la ville ?

10-01-2017 à 22:33:29

Les pics de pollution, annoncés à Paris en décembre 2016 sont-ils une réalité ? Ou bien, les hommes politiques cherchent-ils à séduire leurs électeurs par des décisions prises pour limiter la circulation, des leurres qui calmeraient leurs peurs en matière de santé et de pollution ?

 

 

Quels sont les faits ?

Au niveau global : Le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (CITEPA) chiffre à environ 300 000 tonnes les émissions totales de particules fines inférieurs à 10 microns (PM10). Cette quantité a baissé d’un tiers en vingt ans. Les transports routiers ne sont responsables que de 12 % de ces émissions. Le chauffage des immeubles en émet trois fois plus, l’agriculture également, et l’industrie, deux fois plus. Tous ces chiffres n’incluent pas les particules provenant de l’érosion par le vent, les particules d’origine biologiques (pollens, champignons, bactéries...), ni les émissions d’origines naturelles (volcans...).

Au niveau des villes : La loi a confié à des associations agréées la surveillance de la qualité de l’air (AASQA). À Paris, il s’agit d’AirParif. Quand les seuils de teneurs moyennes de polluants sont dépassés, les préfectures sont tenues de diffuser une information généralisée ou de lancer des alertes pour prendre d’éventuelles décisions.

Que s’est-il passé en décembre 2016 à Paris ?

Il n’y a pas eu une grande cohérence entre les alertes et les décisions d’imposer la circulation alternée : aucune mesure de circulation n’a été décidée les 1 et 2 décembre alors que l’alerte était lancée. Elles ont été maintenues les 8 et 9 décembre alors que les seuils d’alerte étaient retombés.

Le préfet a la réputation de rechigner à mettre en place la circulation alternée, car il sait le peu d’effet qu’a cette mesure. Il le fait sous la pression des ONG et des élus écologistes des villes. Pourquoi ? Probablement les techniciens savent-ils un certain nombre de faits…

• Faible impact de la circulation automobile sur les particules fines : AirParif a établi un bilan officiel de la circulation alternée de mars 2014. Elle n’avait réduit en moyenne que de 6 % la pollution aux particules. D’ailleurs, un dépassement de seuil a eu lieu le 30 décembre, alors que les voitures (ou leurs chauffeurs) avaient déserté Paris pour les vacances.

• Les pics de pollution ne sont pas des pics urbains mais continentaux : La carte publiée par l’agence gouvernementale Prev’Air montre bien que lors du pic de pollution du 19 mars 2015, toute l’Europe était soumise à des mouvements de particules fines PM10 d’ampleur considérable.

 

• La teneur en particules fines est plus importante dans le métro que dans la rue

Le réseau officiel de surveillance de la qualité de l’air de l’environnement souterrain (SQUALES) publie régulièrement les taux de particules fines mesurés dans le métro. Ils ont des valeurs très élevées, atteignant plus de trois fois le taux extérieur (en bleu clair sur le graphique). La circulation alternée, incitant les Parisiens à prendre le métro pour éviter les particules fines, est-elle un bon conseil ?

 

Les particules fines sont-elles dangereuses pour la santé ?

La pollution aux particules fines est un fait certain : des milliers de personnes en sont mortes au cours des XIXe et XXe siècles. Le phénomène continue, par exemple en Chine, qui brûle des quantités importantes de charbon sans filtrer les poussières émises. En France, ce n’est plus le cas.L’Organisation mondiale de la santé (OMS), parle de millions de décès liés à la pollution de l’air. Ce sont, en réalité, des décès prématurés, ce qui est très différent. Le chiffre de 48 000 morts par an annoncé en France fait froid dans le dos. Le très officiel Institut national de veille sanitaire (INVS) a publié une étude épidémiologique en septembre 2009. Son analyse « n’a pas mis en évidence de facteurs influençant l’impact de la pollution ». Ces conclusions sont fréquentes. Par exemple, la Society For Risk Analysis, estime qu’« il n’est pas exclu que le coefficient de cause de mortalité par les particules PM2.5 soit égal à zéro ». Le Figaro du 5 janvier 2017 a le sentiment que, « même en réduisant la pollution à zéro, on n’évitera pas 48 000 morts ». Les experts cités mettent en garde : « Trop se focaliser sur des facteurs qui ont peu ou pas d’effet sur le risque brouille les messages et contribue donc indirectement à l’augmentation du risque ».

 

Conclusion

En matière d’écologie, il faut être très prudent quand une information provoque la peur. Ce sont souvent des leurres. Malgré tout, il faut chercher à réduire toutes les pollutions qui nuisent à l’homme à condition que ce soit raisonné et économiquement rentable. La vérité permet de prendre les bonnes décisions. La peur incite souvent à se soumettre à de mauvais préjugés. Mais, comme disait Albert Einstein, « Il est plus facile de désintégrer un atome qu’un préjugé ».

 

Pour aller plus loin : http://jeunes33.les2ailes.com

 

Mots compliqués

 

Leurre : Son nom vient du vieil allemand luoder (« appât, chose qui attire »). Les leurres sont utilisés par les pécheurs pour appâter les poissons. Plus généralement, leurrer quelqu’un signifie le tromper.

Micron : Du grec ancien mikrós (« petit »). Un micron est une mesure de longueur. Il y a 1000 microns dans un millimètre.

Étude épidémiologique : Le mot vient du grec épidoemia. Il évoque tout ce qui peut influencer la santé des populations.

Préjugé : Vient du latin judicare (« rendre un jugement, juger ») et du préfixe pré- (« avant »). Un préjugé est une opinion retenue avant de réfléchir ou d’approfondir un sujet.

 

 

 Actuailes n° 62 – 11 janvier 2017

 

 

 

 

 

 

 


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