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La philosophie transhumaniste

La philosophie transhumaniste

15-06-2015 à 00:12:33

Définition

Le transhumanisme est une philosophie rationaliste et un mouvement culturel qui a pour objectif de transformer la nature humaine. Cette philosophie part de l’idée que notre création serait « ratée » puisque l’homme souffre, tombe malade, et meurt. Dès lors, les transhumanistes s’appuient sur la technologie pour changer non seulement la nature, mais la nature de l’homme elle-même.
Il faut se demander si c’est une technique ou une philosophie ? Est-ce du domaine de la pratique ou de la croyance ? Pour y répondre, il faut se demander s’il on peut changer l’homme ? Quels sont les objectifs et quels sont les moyens à disposition ?

Les quatre objectifs du transhumanisme consistent à :

 Augmenter les capacités cognitives de l’homme.
Lexemple classique qui est souvent cité est celui de l’utilisation d’un médicament destiné à soigner des personnes atteintes de trouble de l’attention. Le but est d’améliorer leur capacité de concentration, de veiller sans fatigue, de calculer plus vite, ou de mémoriser sans effort, alors que ces personnes sont en bonne santé.
 Maîtriser lhumeur de lhomme.
On envisage, non plus dutiliser des antidépresseurs, mais de poser des électrodes dans le cerveau pour influer sur lhumeur des personnes.
Augmenter les capacités corporelles.
Cet objectif couvre déjà le domaine des opérations cosmétiques, mais maintenant celui de la recherche sur les liaisons cerveau-ordinateur. On les utilise déjà, de manière expérimentale pour aider des personnes handicapées, à communiquer avec des ordinateurs et, par ce moyen, avec le monde extérieur. On pourrait aussi modifier les gènes de l’homme pour accroître certaines fonctions corporelles. Les prothèses qui existent déjà pourraient être de plus en plus sophistiquées et permettre d’obtenir des capacités renforcées, par exemple une force musculaire ou une résistance du squelette au-delà de la « normale », par exemple pour courir plus longtemps.
Augmenter la durée de vie humaine.
Il s’agit de chercher à ralentir le processus de vieillissement grâce à des médicaments adéquats ou même le remplacement des organes. L’idée transhumaniste est de vivre très longtemps, de ne plus mourir de vieillesse et, comme le dit un transhumaniste, « de décider soi-même combien de temps on vivrait ».

Les moyens techniques à disposition du transhumanisme 
Une grande variété de moyens peuvent déjà être utilisés pour de tels objectifs d’« amélioration de l’homme », entre autres :
avec la nourriture, on peut jouer sur la capacité de conscience en consommant de la caféine à des doses excessives ;
 avec des produits pharmaceutiques utilisés par des personnes en bonne santé, on peut également augmenter leurs capacités de concentration ;
 avec des prothèses ou des implants, on peut augmenter les capacités physiques d'un homme en bonne santé avec des techniques généralement utilisées sur des personnes malades. On peut imaginer implanter des stimulateurs cardiaques sur des sportifs, ou des rétines artificielles permettant à des personnes non malades de développer leur vue dans l'infrarouge. Il existe de nombreuses technologies pour cela, par exemple, des électrodes destinées à exercer une stimulation cérébrale profonde, des puces intégrées dans le système nerveux et toutes les nanotechnologies ;
 avec des interfaces cerveau-machines, le transhumanisme espère pouvoir connecter un cerveau avec des ordinateurs. Des expérimentations sont déjà en cours. Ce n’est pas de la science-fiction ;
 avec la biologie génétique, on sait déjà trier les embryons pour une « procréation médicalement assistée ». Mais le transhumanisme voudrait modifier la génétique des générations futures. L’idée du transhumanisme est de libérer l’homme de son « incarnation » pour qu’il devienne le constructeur de son corps.

Les grandes erreurs philosophiques du transhumanisme
Le concept de mort.
Pour le transhumanisme, la mort n’est rien. C’est simplement la fin d’une expérimentation sur la création de l’éternité. À leurs yeux, le vieillissement et la mort sont des pannes qu’il faut réparer.
Le concept de personne humaine. 
Le transhumanisme nous amène à nous demander quelle conception nous avons de l’homme lui-même. L’homme n’est pas qu'une machine biologique.
 La confusion entre homme et machine technologique.
Le corps humain n’est pas une machine. Le transhumanisme se trompe en confondant le corps et les objets qui nous entourent. En effet, il y a toujours un lien particulier entre le corps et les machines : le geste. Les machines et les objets que l’homme fabrique ne sont que le prolongement d’un geste. Une machine, même une prothèse, ne copie pas le corps, car le corps et la machine ne sont pas équivalents : même lorsque la machine prend beaucoup de place dans notre vie, elle est actionnée ou fabriquée par un geste du corps ; une prothèse ne remplace pas une partie du corps, mais un geste du corps.
La confusion entre homme et animal.
Avec le transhumanisme, tout est embrouillé : même quand on réfléchit à la folie des camps de concentration, on s'est demandé si l'homme n'était pas devenu un loup avec les autres hommes, mais c’était une manière de réaliser que l’homme n’est pas un animal, même si l’homme perd quelquefois son humanité en torturant ses proches. Dans ces cas extrêmes, l’homme est une évidence, l’inhumain est une altération.
Mais le transhumanisme pense que l’homme n’est que l’idée qu’il s’en fait. Pour lui, les limites de l'homme deviennent de plus en plus l’objet de négociations.
La confusion entre puissance et liberté.
On s’imagine que plus on a de capacité à agir, plus on est libre. En fait, quand bien même l’homme serait capable de voler dans l’air comme un oiseau, il ne serait pas plus libre. La liberté est un état d’esprit. Elle est le résultat de l’intention que l’on met dans nos actes.
Le concept de conscience.
Le transhumanisme confond les expressions : « avoir conscience » et « être conscient ». La langue anglaise utilise d’ailleurs deux mots distinguant la conscience que l’on « a » (awareness), au sens de la connaissance de mon état qui me permet d’interagir avec ce qui m’entoure. Une machine puissante pourra interagir plus rapidement. L’autre sens correspond à ce dont on « est » conscient (consciousness). Cette conscience est vulnérable et partiale, dans la mesure où elle est le fruit d’un point de vue de la personne. La machine ne peut pas avoir accès à cette conscience-là qui est fondamentalement le propre de l’homme.

Les grandes erreurs morales du transhumanisme 
La machine, la technique, les prothèses, tout ce qui résulte de la technologie sont des concepts vides de sens. Ils ne sont ni bon ni mauvais. ils ne sont que ce que l’homme en fait. Des prothèses même très complexes ou microscopiques peuvent être bonnes si l’intention de celui qui l’adopte est bonne. Il faut donc approfondir la réflexion sur le plan moral en se posant quelques questions :
Les moyens utilisés sont-ils réversibles ?
Par exemple, une modification génétique est irréversible, car elle produit des changements permanents. Au contraire, la plupart des produits pharmaceutiques ont des effets réversibles.
Cherche-t-on la promotion de la santé ou l’amélioration de l’homme ?
Il importe de distinguer entre un « traitement » qui restaure un organisme altéré par une maladie, et une « amélioration » des capacités de cet organisme au-delà de leur niveau normal. Cette frontière n’est pas toujours totalement claire.
Qu’attendons-nous réellement des technologies amélioratives ?
Ne sont-elles pas parfois excessives ? Répondent-elles à un effet de mode, qui pourrait faire oublier les moyens classiques de développement humain, comme l’éducation, la pédagogie ou le style de vie ? Rêvons-nous de bénéfices dans l’ordre de l’efficacité individuelle et donc des avantages dans la compétitivité sociale, au détriment de la solidarité avec les plus faibles.
Qu’est ce que l’homme, et en quoi est-il atteint par le transhumanisme ?
Il faut s’interroger sur le sens de l’expression « amélioration de l’homme » : s’agit-il d’un développement de l’homme ou uniquement de certaines capacités ? Il ne s’agit pas du développement de la personne tout entière. Par ailleurs, la santé humaine ne concerne pas uniquement la dimension corporelle. Elle a une dimension psychologique et sociale, et, il ne faut pas l’oublier, une dimension spirituelle.
Il est important de comprendre ce que ne peuvent pas apporter ces techniques de « transformation de l’homme ».
Elles ne proposent pas de moyens pour résoudre les problèmes principaux de la vie humaine : la souffrance, le manque de confiance et d’amour. Pour le Groupe de réflexion bioéthique, une vie humaine réussie comporte l’acceptation des limites de la condition humaine.
En quoi le transhumanisme a-t-il un impact sur le concept de solidarité ? 
Certains peuvent chercher à bénéficier de techniques d’« amélioration » pour des raisons strictement personnelles. Ce qui est recherché peut être une supériorité sur autrui, voire une volonté de domination. Un des premiers effet du transhumanisme serait l’altération de notre solidarité inter-générationnelle : l’envers de la mort, c’est la natalité. Un genre humain qui vieillit n’envisage plus son renouvellement. Quelle place peut-on faire au renouvellement si on ne meurt plus ? Aucune !
Pour résumer, le transhumanisme risque de faire croire que ce que je suis ne dépendrait que de moi, de la programmation que je réclamerais sur moi. Mais quelle valeur cela aurait-il ? La consommation d’objets nouveaux nous apprend que, après un bref plaisir de les posséder, les objets deviennent sans intérêt. L'homme devra-t-il être recyclé comme un simple objet en fin de satisfaction par son propriétaire ?

Perspective

Le transhumanisme ne doit pas nous conduire à condamner les techniques, mêmes les plus modernes. L’évaluation est à faire cas par cas en vérifiant les critères philosophiques et moraux ci-dessus, avant d’appliquer une technologie sur une personne déterminée. Dans les applications sur les personnes présentant un handicap, il convient de faire preuve d’une grande prudence de manière à éviter de franchir la frontière entre thérapie et « amélioration de l’homme ». 

Stanislas de Larminat

Pour aller plus loin, cliquer ici ou sur  http://jeunes13.les2ailes.com

 

Mots compliqués

Cognitive

Du latin cognito, c'est-à-dire « connaître ». La capacité humaine de connaître est à la fois spirituelle, mais elle est incarnée dans notre corps, et en particulier dans le cerveau. En biologie, on parle alors des capacités « cognitives » du cerveau.

 

Rationaliste

Vient du latin ratio qui signifie « raison ». Le rationalisme est une philosophie qui privilégie le raisonnement comme seule source d’accès à la connaissance en négligeant l’intuition, la contemplation ou le spirituel.

 

Antidépresseurs

La pression est un concept de physique qui exprime la force exercée par une réalité physique sur une surface, par exemple le poids dun objet sur la surface d’une table. Une dépression est la baisse de pression, par exemple quand le poids de l’air diminue à la surface de l’océan, les météorologues parlent dune dépression. Par extension, en psychologie, on parlera dune personne en dépression, car la force de son attention diminue sur sa personne. Cest souvent une maladie qui se soigne avec des médicaments qu’on appelle des antidépresseurs. 

Infrarouge

Dans certaines conditions météorologiques, il arrive de voir un arc-en-ciel qui montre que la lumière blanche est, en réalité, une sorte d’accumulation de couleurs qui vont du rouge au violet en passant par le bleu, le vert, le jaune, etc. L’œil humain ne voit que les couleurs situées entre le rouge et le violet. Les transhumanistes pourraient imaginer de connecter lœil à des instruments optiques permettant de détecter les infrarouge qui sont des couleurs non visibles par lœil. 
 

Nanotechnologies

Du latin nano qui signifie « nain », c’est-à-dire quelque chose ou quelqu’un de très petit. On utilise cette racine comme unité de mesure dans le mot nanomètre. Il y a un million de nanomètres dans un millimètre. On parle de nanotechnologies pour désigner des techniques utilisant, par exemple, des molécules qui ont des dimensions nano.

Prothèse

Dérivé du grec thesis, qui signifie « action de poser ». Une thèse est souvent utilisée pour désigner un raisonnement de la pensée qu’on pose. En médecine, on parle de prothèse pour désigner quelque chose qu’on pose en avant d’un organe pour remplacer celui qui est défaillant. Une jambe de bois était, autrefois, une prothèse destinée à remplacer la jambe que quelqu’un avait perdue. 


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