Vendredi 13 novembre, en déclenchant de terribles attaques dans différents lieux de la capitale, les terroristes ont mis en état d’urgence les services de soins : brutalement, de nombreuses victimes, dans un état parfois très grave ont eu besoin de secours.
Les secours (pompiers et SAMU) français sont entraînés à réagir dans ce genre de situation, que l’on appelle « médecine de catastrophe », et le matin même des attentats un grand exercice avait lieu, mimant une attaque terroriste…
Voici quelles sont les caractéristiques de cette réaction : quand les pompiers ou le Samu sont appelés pour un événement où il y a beaucoup de victimes, ils peuvent déclencher le premier plan de secours : le plan rouge, qui concerne tout ce qui se passe avant l’arrivée à l’hôpital.Un seul chef, le préfet coordonne l’action des différents acteurs, sur place ou à la préfecture. Sur les lieux de la catastrophe, il a sous ses ordres le COS (commandant des opérations de secours), qui dirige à la fois le responsable des pompiers (DSIS) et le directeur des secours médicaux (DSM), un médecin du SAMU en général, auquel nous nous intéressons en particulier : son travail consiste à organiser le ramassage, les premiers soins et le transfert des victimes vers les hôpitaux.
Le système médical français part du principe que c’est sur place qu’il faut faire les soins d’urgence, pour ne pas perdre de temps et pour orienter ensuite le patient vers le bon service hospitalier selon son état (réanimation, chirurgie…).On organise donc un poste médical avancé (PMA), un petit hôpital provisoire avec tout le matériel d’urgence (perfusions, oxygène, respirateurs, etc.) le plus près possible de la catastrophe, dans un lieu sûr et si possible alimenté en électricité. Le ramassage des victimes (appelé petite noria) les emmène en premier lieu au PMA où a lieu le « tri » : le médecin responsable repère quelles sont les urgences absolues ou les urgences relatives (qui peuvent attendre un peu). Après le tri vient la « stabilisation » : il faut que toutes les urgences absolues soient prisent en charge immédiatement par un médecin pour pouvoir survivre lors du transfert vers un hôpital. « Stabiliser », c’est permettre que le patient respire, parfois grâce à une machine, et que son cœur envoie le sang aux organes, ce qui veut dire le transfuser s’il en a perdu beaucoup, arrêter un saignement avant de l’envoyer, faire repartir le cœur s’il s’est arrêté. C’est enfin empêcher que l’état s’aggrave davantage en anticipant ce qui pourrait se passer par la suite.
Puis vient le moment du transfert depuis le PMA jusqu’aux hôpitaux, c’est ce qu’on appelle la grande noria : des véhicules du SAMU, des pompiers, des ambulances privées, de la Croix-Rouge répartissent les patients dans les hôpitaux selon la taille et les services qui s’y trouvent (chirurgie du cœur, des os, etc.). Les patients les moins atteints sont envoyés plus loin, les grandes urgences au plus près. Vient alors le temps du plan blanc dans les hôpitaux : chaque hôpital a une cellule de crise qui le déclenche en cas d’afflux de nombreuses victimes : toutes les activités non urgentes au bloc opératoire sont arrêtées pour s’occuper des blessés, les lits de tous les services peuvent servir pour les accueillir. Les médecins et infirmières restent tous sur place même s’ils ont fini leur journée et ceux qui sont chez eux sont rappelés en renfort, le temps que tous les patients soient gérés.
Voilà ce qui s’est passé vendredi, une vingtaine d’hôpitaux ont déclenché leur plan blanc, de très nombreux personnels de soins ont spontanément proposé leur aide, pour secourir les blessés si nombreux et limiter le nombre de décès. En parallèle des soins corporels, il ne faut pas oublier le travail des psychologues et des psychiatres qui commence près du PMA dans les postes d’accueil des urgences médico-psychologiques (PUMP) et se poursuit dans les hôpitaux et par la suite. Toutes les personnes qui ont vécu ou vu une telle violence à un moment où ils ne s’y attendaient pas, ont des blessures psychologiques (de leurs sentiments ou de leurs pensées) à guérir en consultant auprès de ces spécialistes. Ils risquent de développer un syndrome de stress post-traumatique, c’est-à-dire une angoisse très envahissante qui les empêche de reprendre leur vie normale.
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