Pourquoi une encyclique sur l’écologie ?
Les encycliques sont des « lettres circulaires » adressées par le pape aux fidèles. Elles n’engagent pas l’infaillibilité pontificale. Ce sont des textes qui ont valeur d’enseignement et rappellent la doctrine de l’Église sur un sujet d’actualité, celui de l’écologie, par exemple.
Une encyclique est nommée par les premiers mots du texte latin. Laudato Si’ veut dire « Loué sois-tu, Seigneur ».
1. Quel est l’état de la planète ?
L’encyclique analyse la situation et dénonce les dégradations sociales, les détériorations de la qualité de la vie humaine, les inégalités, l’augmentation de la violence, la consommation croissante de drogues chez les plus jeunes, le développement de l’injustice planétaire.
Le pape parle ensuite des dégradations de la nature autour de trois dossiers :
– la question de « l'accès à une eau potable sûre » (§ 28).
– les pertes de biodiversité : « des milliers d'espèces, dit le pape, ne rendront plus gloire à Dieu par leur existence et ne pourront plus nous communiquer leur propre message » (§ 33).
– le climat : le pape se réfère au « consensus scientifique » qui le conduit à proposer quelques solutions techniques comme la réduction de « l’émission du dioxyde de carbone [...] , en remplaçant l’utilisation de combustibles fossiles et en accroissant des sources d’énergie renouvelable » (§ 26).
Mais, le pape reconnait « qu’on ne peut pas attribuer une cause scientifiquement déterminable à chaque phénomène particulier [...] Il y a, certes, d’autres facteurs (comme le volcanisme, les variations de l’orbite et de l’axe de la Terre, le cycle solaire) » (§ 23). Il admet que, « sur beaucoup de questions concrètes, en principe, l’Église n’a pas de raison de proposer une parole définitive et elle comprend qu’elle doit écouter puis promouvoir le débat honnête entre scientifiques, en respectant la diversité d’opinions » (§ 61).
2. Quels messages doctrinaux propose le pape ?
Une encyclique a pour objectif de donner des éclairages doctrinaux. Retenons en quelques-uns :
– « Tout est lié »
Le pape répète près de dix fois cette phrase à propos de plusieurs questions : « Puisque tout est lié, la défense de la nature n’est pas compatible non plus avec la justification de l’avortement » (§ 120), « les attaques auxquelles [la famille] est exposée », (§ 213), « l'effacement des différences sexuelles » (§ 155), « la culture du relativisme [...], l’exploitation sexuelle des enfants ou l’abandon des personnes âgées » (§ 123). On voit qu’il aborde indirectement beaucoup de sujets de la société actuelle qui, pour le pape, sont liés à l’écologie.
– « L'anthropocentrisme »
Le pape évoque la philosophie anthropocentrique qui consiste à mettre l’homme au sommet de la Création au point d’avoir un comportement « despotique qui se désintéresserait des autres créatures » (§ 68). Un anthropocentrisme excessif conduit à des dérives graves comme la société techniciste, le « relativisme dans lequel tout ce qui ne sert pas aux intérêts personnels immédiats est privé d'importance » (§ 122), le remplacement de Dieu par de nouvelles idoles. Une spiritualité qui oublie Dieu créateur amène à « adorer d'autres pouvoirs du monde [...] La meilleure manière de mettre l’être humain à sa place, et de mettre fin à ses prétentions d’être un dominateur absolu de la terre, c’est de proposer la figure d’un Père créateur et unique maître du monde » (§ 75).
L’encyclique ne condamne pas la technologie : « Nous sommes les héritiers de deux siècles d’énormes vagues de changement. Il est juste [...] de s’enthousiasmer devant les grandes possibilités que nous ouvrent ces constantes nouveautés, parce que la science et la technologie sont un produit merveilleux de la créativité humaine, ce don de Dieu ». Mais le pape met en garde : « l’anthropocentrisme moderne, paradoxalement, a fini par mettre la raison technique au-dessus de la réalité » (§ 115).
Comment rééquilibrer les choses ? L’encyclique propose quelques pistes : restaurer dans nos cultures le sens du travail, revenir au bien commun et au sens de la famille.
– Une « anthropologie de la relation ».
L’anthropologie est une science de l’être humain dans ses différentes dimensions : sociales, culturelles, biologiques, et même spirituelles.
C'est à ce dernier titre que le pape parle d’une anthropologie chrétienne. Pour lui, l’homme est relation : relation entre Dieu et l’homme, relation entre l’homme et la nature, relation entre les hommes eux-mêmes, en particulier les plus pauvres ; ces relations sont faites d’intelligence et d’amour. Le mot « relation » est utilisé des dizaines et dizaines de fois. Le pape conclut : « Il n’y a pas d’écologie sans anthropologie adéquate ».
Ces réflexions sont très concrètes et conduisent par exemple le pape à faire l'éloge de la ville : « Elle nous héberge et nous unit » (§ 151), la ville doit être « un espace vraiment partagé avec les autres ». C'est ainsi que le pape François se laisse aller à un élan personnel : « Comme elles sont belles, les villes qui, même dans leur architecture, sont remplies d’espaces qui regroupent, mettent en relation et favorisent la reconnaissance de l’autre ! » (§ 152).
Conclusion
La mission du pape, dans une encyclique, est toujours de montrer comment le Christ éclaire notre vie. En matière d’écologie, le pape rappelle qu’il faut dépasser le contexte temporel car toute la Création est appelée vers une Terre nouvelle, c’est-à-dire celle qui suivra notre propre résurrection : « pour la compréhension chrétienne de la réalité, le destin de toute la Création passe par le mystère du Christ, qui est présent depuis l'origine de toutes choses : "Tout est créé par Lui et pour Lui" (Col 1, 16) ».
Stanislas de Larminat
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Mots compliqués
Encyclique
Le mot vient du grec enkuklios qui signifie « en cercle ». C’est une lettre adressée par le pape à l’ensemble des fidèles sous forme d’une sorte de « lettre circulaire » (voir ce mot).
Lettre circulaire
C’est une lettre adressée à plusieurs destinataires en même temps. Cela évite d’obliger chaque destinataire de la faire « tourner » entre les personnes concernées.
Infaillibilité
Le mot vient du verbe latin fallere qui signifie « faillir, tromper ». Une personne est infaillible si elle ne peut pas se tromper. On parle ainsi de l’infaillibilité du pape, mais dans des conditions très précises.
Doctrine
Mot venant du latin doctrina qui signifie « enseignement, théorie, méthode ». Dans l’Église, On parle de doctrine pour évoquer un enseignement religieux ou un enseignement de Dieu Lui-même.
Consensus
Le mot est repris du latin lui-même qui signifie « accord ». Le mot a deux sens. Le plus courant est celui de l’accord du plus grand nombre de l’opinion publique. Toutefois, dans les organisations internationales, le mot désigne une procédure qui consiste à dégager un accord sans procéder à un vote formel, ce qui évite de faire apparaître les objections et les abstentions. Cela cache alors l’inverse même d’une vérité sur laquelle tout le monde serait d’accord.
Énergies renouvelables
L’expression s’oppose aux énergies issues des réserves de charbon ou de pétrole. Les énergies issues du vent, du Soleil ou de la végétation sont « renouvelables » au sens où elles sont inépuisables. C’est un concept que certains considèrent comme faux, car, pour les mettre en œuvre avec des éoliennes, des panneaux solaires ou des chaudières à bois, il faut investir des quantités importantes de métaux ou de ciments qui sont non renouvelables, surtout si leur rendement n’est pas efficace.
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