Cette semaine, l’actualité judiciaire a été riche en procès… Deux procès en assises en particulier ont occupé les médias, celui (en appel) du procès des meurtriers de la petite Fiona et celui d’Abdelkader Merah, le frère de Mohammed Merah, auteur d’actes de terrorisme en 2012.
Dans les deux cas, on juge des personnes – présumées coupables – pour meurtre ou complicité de meurtre. Pourtant, dans le procès de la petit Fiona, on parle de cour d’assises et, dans le procès d’Abdelkader Merah, on parle de cour d’assises spéciale.
Qu’est-ce que la cour d’assises ?Et pourquoi parle-t-on, dans certains cas, de cour d’assises spéciale ?
La cour d’assises est le tribunal compétent pour juger des actes les plus graves, c’est-à-dire pour juger les personnes poursuivies pour avoir commis des crimes. Par crime, on entend les actes suivants : meurtre, viol, vol à main armée…
La cour d’assises n’est pas une juridiction permanente. Elle se réunit en général, dans chaque département, tous les trois mois pendant quinze jours. Quinze jours durant lesquels vont être jugées plusieurs affaires de crimes commis dans le département.
Durant un procès en cour d’assises, on distingue plusieurs acteurs :
• l’accusé, bien sûr, toujours représenté par son avocat ;
• le Ministère public, représenté par un procureur appelé « avocat général » qui représente la société et demande l’application de la loi ;
• les parties civiles, c’est-à-dire les victimes directes et indirectes (par exemple, la famille de la personne tuée) représentées par leurs avocats ;
• le greffier qui est une sorte de secrétaire et qui retranscrit la totalité des débats.
Une cour d’assises présente la particularité d’être composée de juges professionnels et de citoyens. En effet, chaque affaire d’assises est jugée par trois juges professionnels, un président et deux assesseurs ; accompagnés d’un juré de six citoyens tirés au sort à partir des listes électorales.
Les procès en assises sont publics. Cela veut dire que tout le monde peut y assister. Dans certains cas toutefois, le président de la cour peut décider que le procès se tiendra à huis clos. Cela peut être le cas, par exemple, lorsque les accusés ou les victimes sont mineurs ou que le contenu des débats peut être choquant.
Un procès en assises se déroule selon une procédure bien précise :
D’abord, le président rappelle les faits et interroge l’accusé. Il lui rappelle également son droit de garder le silence pendant les débats ou d’avoir un interprète.
Ensuite, il est procédé à l’interrogatoire des témoins qui prêtent serment, des experts et des victimes.
Les débats se terminent par les plaidoiries, avec, dans l’ordre, la plaidoirie de l’avocat général qui va réclamer l’application d’une peine en particulier, la plaidoirie des avocats des parties civiles et enfin celle de l’avocat de l’accusé.
À la toute fin, il est donné la possibilité à l’accusé de s’exprimer une dernière fois.
Les juges et les jurés quittent alors la salle d’audience et se réunissent en chambre de délibération. Le délibéré se déroule en deux étapes. D’abord, les juges et les jurés vont statuer sur la culpabilité ou l’innocence de l’accusé. Le vote se fait par bulletin secret à la majorité de six voix ; précisons qu’un vote blanc ou nul profite toujours à l’accusé.
Si la majorité vote la culpabilité, il est alors décidé de la peine. Il peut s’agir d’une peine de prison ferme ou d’une peine de prison avec sursis (c’est-à-dire que l’accusé n’exécutera sa peine de prison que s’il est condamné pour une autre infraction dans un délai de cinq ans).
Les juges et les jurés peuvent décider de suivre les réquisitions de l’avocat général qui aura demandé l’application d’une certaine peine lors de sa plaidoirie, mais ils sont tout à fait libres de prévoir une autre peine.
Ensuite, les juges et le jury retournent en salle d’audience. Le président lit la décision à l’accusé et rappelle que l’avocat général, l’accusé et, dans une certaine mesure, les victimes, pourront faire appel de la décision dans un délai de dix jours.
Cette procédure est respectée lors de tous les procès d’assises. Toutefois, il faut préciser le cas spécifique des affaires liées à des actes de grand banditisme et à des actes de terrorisme. Dans ces deux domaines, la cour d’assise qui se réunit est une cour d’assises dite « spéciale ». Elle présente deux différences : d’abord elle ne se réunit qu’à Paris et ensuite elle n’est composée que de magistrats professionnels.
Cette particularité remonte à 1986. En effet, cette année-là, lors du procès contre des terroristes du groupe Action directe par la cour d’assises de Paris, les accusés avaient proféré des menaces à l’encontre des jurés. Le lendemain, cinq d’entre eux furent absents ce qui obligea le président à reporter le procès. Le but de l’absence de jury est donc d’éviter tout risque de pression et de menace.
Ces procès sont beaucoup plus longs, car beaucoup plus complexes, et peuvent durer entre deux et douze semaines.
Nous aurons donc l’occasion de revenir sur le procès d’Abdelkader Merah – qui en est à sa deuxième semaine – dans un prochain numéro.
Virginie Terrier
Actuailes n° 75 – 18 octobre 2017
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